Ce que l’on peut dire de la position des catholiques français vis-à-vis de la prochaine élection présidentielle française est qu’elle apparaît malheureusement éclatée, selon un récent sondage, 25% voteraient pour Emmanuel Macron, 25 % pour Valérie Pécresse, 18 % pour Marine Le Pen, et 15 % pour Éric Zemmour. Mais comme les sondages sont devenus des outils de manipulation, on fera très bien de ne pas en tenir compte. Toutefois, ce manque d’unanimité appelle une leçon : il empêche évidemment le vote des catholiques d’être au service de ce qui devrait les rassembler, et qui manifestement ne les rassemble pas, comme s’ils ne cherchaient pas tous « l’unique nécessaire (Lc 10.42) ». Car même si les catholiques pratiquants ne représentent qu’un infime minorité (1,8% de la population française de + 18 ans), leur influence ne serait pas négligeable, notamment en cas de score serré, s’ils étaient une force reconnaissable et donc reconnue. Ce constat interroge la vérité de leur vie chrétienne et celle de leurs bergers, souvent chantres des bienfaits de la pluralité démocratique, qui enfante le multiculturalisme, la légitimité de la diversité des idéologies, religions, et théologies. Si la gestion des affaires temporelles est naturellement et légitimement source d’opinions divergentes, il n’en reste pas moins que les chrétiens doivent n’avoir tous qu’« une même âme, un même sentiment, un même amour, une même pensée (Ph 2.2) ». Avons-nous oublié que de l’unité des chrétiens dépend rien moins que le salut du monde (Jn 17.21), et que pour être réelle, cette unité doit être visible, concrète ? Le cardinal Ratzinger a rappelé qu’il y a des principes non-négociables qui demandent à être défendus par tous les hommes de bonne volonté (Cf. Note doctrinale concernant certaines questions sur l’engagement et le comportement des catholiques dans la vie politique). Que servons-nous, un projet politique, ou la venue du Royaume des Cieux ? Et si nous servons la venue du Royaume des Cieux, le Christ peut-Il régner sur terre comme au Ciel lorsque Son Eglise est légion ? 

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Car il est moralement impossible de voter pour le président sortant, qui s’est émancipé du cadre politique pour promouvoir la transgression de la loi naturelle par des lois niant la différence sexuelle, attentant à l’institution du mariage, détruisant les noms de père et de mère, violant le droit des parents à l’éducation de leurs enfants, allongeant le délai légal de l’avortement, etc. Sa pratique du mensonge est aussi massive que ce que sa politique sanitaire anti-covid a été criminelle, révélant la nature totalitaire de ses ambitions, si bien exprimée par son ministre de l’Intérieur : « Il n’y a aucune loi au-dessus de celles de la République. (12.10.2021) » L’opinion d’un jour est ainsi décrétée la référence ultime du bien et du mal, condamnant par avance toute résistance à l’injustice, et le culte divin à été compté parmi les « activités non essentielles ». Et malgré cela Emmanuel Macron n’a pas été solennellement excommunié. Mais le président de la Conférence des évêques de France a été décoré de la légion d’honneur. Dans ce contexte, doit-on s’étonner qu’E. Macron ait la faveur d’une majorité de catholiques ? Pense-t-on sauver ce qu’il reste de catholique dans la société en continuant à jouer la carte du relativisme, pour qui l’islam ou l’idéologie woke sont compatibles avec la République ? Peut-on n’avoir d’autre ambition que celle de promouvoir le jeu démocratique ? N’est-ce pas démocratiquement que la France devient musulmane ?

Que les lois dites de bioéthique ne soient pas abordées dans les débats publics montre le manque d’intérêt pour ces sujets essentiels. Or, cette absence de convictions conduit au mépris d’une politique réduite à des calculs électoraux.

Les Français se sentent-ils menacés dans leur identité ? Même si les sondages montrent les Français préoccupés en priorité par l’économie et l’emploi (54%), et non le changement civilisationnel en cours, cela ne fait que mettre en évidence le sabordage intellectuel mis en œuvre depuis des décennies au point que les Français ont été capables d’élire un Emmanuel Macron niant l’existence d’« une culture française », et donc la France. Ils ne peuvent en effet ignorer le climat de haine qui s’étend comme le montre différents rapports, tel celui sur l’islamisation de la société présenté par la sénatrice Jacqueline Eustache-Brinio, pour qui l’islamisation « a totalement infiltré notre société », ou le reportage à Roubaix qui a valu à la journaliste Ophélie Meunier et à Amine Elbani des fatwas les condamnant à mort et à devoir vivre désormais sous protection policière… 

 Une fois écartés les candidats se prononçant en faveur de la transgression de la Loi naturelle, ne fût-ce que sur un point, généralement placés à gauche de l’échiquier, le choix restera libre entre ceux dont les différences de programmes sont si minimes qu’elles semblent ne subsister que pour manifester le jeu de ceux qui veulent diviser l’opposition à Emmanuel Macron … 

Il y a encore le critère de la vie morale personnelle des candidats : comment croire que celui qui ne respecte pas le mariage, et donc la famille, cellule de base de la société, sera capable de prendre soin de la société tout entière, famille de familles ?

Si le Royaume du Christ n’est pas de ce monde, le critère du choix politique des catholiques est celui qui favorise la venue du Règne de Dieu, non celui de l’unique recherche des biens de ce monde. Il vaut mieux être minoritaire en assumant la mission prophétique de l’Eglise, plutôt que partager le pouvoir au prix de la transgression même du plus petit des commandements divins. C’est en effet par les compromissions et les trahisons que le Démon prend le pouvoir. Aussi, entre deux candidats promouvant chacun la transgression de la loi naturelle, un catholique ne vote pour aucun. Mais le candidat, même non-catholique, qui respecte le mieux les principes non négociables de la loi naturelle — sachant qu’une chose est d’hériter d’un état de fait, et autre chose de l’aggraver —, emportera son suffrage. 

Abbé Guy Pagès

Les dix questions que les AFC proposent de se poser avant d’aller voter dimanche.