Vendredi 5 mai, 9 h, extrait de la troisième conférence donnée à la basilique de Niepokalanow, en Pologne, mai 2023.

Comme je vous le disais hier matin : vouloir être parfait comme Notre Père céleste suppose de Le connaître … Or, aussi vrai qu’il n’y a pas de Père sans Fils, ni de Père et de Fils sans lien qui les unisse, il est impossible de connaître le Père dont nous voulons imiter la perfection, sans contempler la Sainte Trinité, en laquelle chaque personne, comme toute personne, n’existe qu’en relation avec les autres. Je consacre donc deux conférences à ce sujet, dont voici la première partie.

Il faut commencer par douloureusement remarquer que pour nombre de chrétiens la connaissance du mystère de la Trinité apparaît comme une pure connaissance intellectuelle sans conséquence dans leur vie. On leur dirait qu’il y a deux ou quatre personnes en Dieu que cela les laisserait totalement indifférents … Beaucoup se contentent de prier et de vivre devant le “bon Dieu” sans trop chercher à Le connaître. Au catéchisme, on ne parle pas de la Trinité, car ce serait – soi-disant – trop compliqué pour des enfants, et une fois devenus adultes, on ne leur en parle pas davantage. Pourtant, la confrontation avec l’Islam, mais aussi avec les religions d’Extrême-Orient, et la résurgence des paganismes en Occident, exige des chrétiens de redonner au mystère de la Trinité sa place centrale dans la vie chrétienne, dont il est le fondement et l’horizon. La connaissance du mystère de la Trinité est ce qui doit transformer de fond en comble notre vie de chaque instant, puisqu’être chrétien, ce n’est absolument rien d’autre que de vivre dans la société, la compagnie, l’intimité, la familiarité du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Nous n’avons été créés que pour cela ! Et là seulement est le sens et le but de notre vie ! Être chrétien, c’est d’abord et essentiellement connaître, aimer, adorer la Trinité, que le Fils incarné a fait connaître. « La vie éternelle, c’est de Te connaître, Toi le seul vrai Dieu, et Celui que Tu as envoyé. (Jn 17.3) » Deux amants diraient-ils que se connaître ne change rien à leur vie ? Il n’y a donc pas de vie chrétienne sans connaissance du mystère de la Trinité, d’où découle celle du péché, de l’Incarnation, de la Rédemption, des Sacrements, de l’Eglise … Notre destinée surnaturelle et donc éternelle consiste précisément dans les relations de connaissance et d’amour, que nous aurons établies ou non, avec chacune des personnes divines, le Père, le Fils, et le Saint-Esprit. La Trinité est le but et l’accomplissement de la vie du chrétien et de l’Eglise. Aussi, une expérience vécue de la foi trinitaire est-elle la condition nécessaire pour la fécondité de la vie des chrétiens, et d’une authentique célébration de Dieu en Église.

La Sainte-Trinité n’est pas un problème pour notre réflexion, mais un mystère d’amour ineffable pour notre cœur. C’est une histoire, une vie, une famille en laquelle Dieu nous invite à entrer et demeurer, si nous avons du cœur : « Et nous, nous avons reconnu l’amour que Dieu a pour nous, et nous y avons cru. Dieu est amour : celui qui demeure dans l’amour demeure en Dieu et Dieu demeure en lui. (1 Jn 4.16) ». Le propre de l’amour est de faire exister l’autre, c’est pourquoi la connaissance de la Sainte-Trinité donne la vie : « La vie éternelle, dit Jésus, c’est de Te connaître, Toi le seul vrai Dieu, et Celui que Tu as envoyé : Jésus-Christ (Jn 17.3) ».

Connaître Dieu n’est pas à portée humaine, Dieu est Dieu, et Lui seul. Et cependant, Il a daigné Se faire connaître : « Personne ne connaît le Fils, sinon le Père ; et personne ne connaît le Père, sinon le Fils et celui à qui le Fils veut le révéler. (Mt.11.27) » Puisque le Christ est venu révéler le Père en Se présentant comme le Fils, comment ne pas Lui demander avec Philippe : « Seigneur, montre-nous le Père, et cela nous suffit (Jn 14.8) » ? Vous connaissez la réponse de Jésus : « Philippe ! Qui Me voit, voit le Père. (Ibid.) » Ainsi, en regardant Jésus, nous apprenons à connaître le Père. Et avec saint Paul nous dirons : « Je tiens tout désormais comme méprisable à cause de la sublime connaissance de Jésus-Christ mon Seigneur. (Ph 3.8) »

De quelques difficultés pour entrer dans la méditation du dogme trinitaire :

• Un énorme danger apparaît chaque jour davantage face au devoir de connaître la Sainte Trinité : c’est la confession d’un « simple » monothéisme, qui serait l’essentiel de la foi et la solution à nombre de sempiternels problèmes : juifs, chrétiens, musulmans, adorant tous le même Dieu en des traditions différentes. Thora, Coran, et Evangile, trois livres qui diraient en gros les mêmes choses : il n’y a qu’un seul Dieu, et qu’un seul fondateur, Abraham. Ceci est un discours parfaitement musulman (Coran 2.135), et qui de plus met pluralisme et tolérance à l’honneur ! Que voulez-vous de mieux ? C’est ainsi que le pape François lors de son voyage en Irak a affirmé : « Aujourd’hui, nous, juifs, chrétiens et musulmans, avec nos frères et sœurs d’autres religions, nous honorons notre père Abraham ». Un mois auparavant il avait enseigné à Abou Dhabi : « Dieu veut la pluralité des religions (Déclaration sur la Fraternité humaine, 19.02.2019) ». En ce cas, par exemple, évangéliser va contre la Volonté de Dieu … Vous ne voudriez tout de même pas faire figure d’arriérés, d’affreux intégristes, en vous intéressant à ce qui divise plutôt qu’à ce qui unit !

• Un autre danger, aux terribles conséquences, est d’écarter le désir et l’espérance de jouir de Dieu. Dieu aime d’abord le Bien infini qu’Il est Lui-même, Il S’y repose dans une joie infinie qu’Il veut nous communiquer. « Comme le Père M’a aimé, Je vous ai aussi aimés. Demeurez dans Mon amour. Si vous gardez Mes commandements, vous demeurerez dans Mon amour, de même que J’ai gardé les commandements de mon Père, et que Je demeure dans Son amour. Je vous ai dit ces choses, afin que Ma joie soit en vous, et que votre joie soit parfaite. (Jn 15.9-11) » ; « Et maintenant Je viens vers Toi, Père, et Je dis ces choses dans le monde, afin qu’ils aient en eux ma joie parfaite. (Jn 17.13) » 

Nous offenserions donc Dieu si nous ne désirions pas la joie parfaite qui nous est offerte. L’erreur (de Luther) a été de soutenir que le véritable amour enseigné par le Christ consistait seulement à donner, à se donner, sans se reposer dans le Bien divin, sans désir aucun de jouir de Dieu. Dans ce cas, nous aurons vite fini de donner, car que donner si nous ne recevons pas, si nous ne savons pas nous reposer en Dieu, dans la joie de Dieu d’être Dieu … Il ne s’agit pas d’être de simple canaux vides à la première sécheresse, mais des réservoirs qui ne donnent que de leur trop-plein. Devenir capable de jouir de la joie de Dieu d’être Dieu implique de purifier nos facultés d’intelligence et d’amour. Une fois écarté le désir de jouir de Dieu dans la contemplation de son Être parfait, le désir de jouir de nous-mêmes prend la place, et devient le principe du culte de l’homme, de l’homme qui s’adore lui-même.

• Un autre danger tient aux représentations picturales de la Trinité, qui entraînent, pour ceux qui les contemplent sans avoir reçu de formation doctrinale, le danger de diviser et de multiplier la très simple et unique nature divine, de penser les personnes divines chacune extérieure aux autres. Par exemple, en Occident, le Père est montré comme un vieillard (Cf “l’Ancien de jours” et le “Fils de l’Homme” de Dn 7), ce qui pourrait laisser penser que le Père est antérieur aux autres personnes divines et faire oublier l’immuable jeunesse de Dieu.

Ce qui est requis pour entrer dans la contemplation de ce mystère

A.      La première chose requise pour entrer dans le mystère de la Sainte-Trinité, comme en celui de Jésus-Christ, est de bien garder en mémoire la distinction entre les notions de nature et de personne. Nous tous ici avons la même nature humaine, mais nous ne sommes pas tous la même personne. Ainsi peut-on comprendre qu’il ne soit pas contradictoire d’affirmer qu’il y a en Dieu une nature et trois personnes, comme en Jésus une personne et deux natures. L

Pour contrer ces hérésies la théologie chrétienne a dû forger de nouvelles notions, indispensables à l’intelligence du Mystère de la Foi, telle la notion de « personne ». Dans l’Antiquité grecque, le mot prosopon (en lat. persona) désigne le masque que revêt l’acteur pendant le déroulement d’une tragédie. Les stoïciens reprennent ensuite ce terme pour signifier l’idée de rôle joué par chaque individu dans son existence terrestre, indiquant ainsi l’idée d’une présence indirecte que manifestent et voilent à la fois le masque ou le rôle. Ce thème de la transcendance de l’être sur sa manifestation est encore plus explicite dans la définition du second mot grec que traduit le mot personne : Hypostase. Littéralement, ce terme signifie : « ce qui se tient sous l’apparence ». Il qualifie l’individu dont l’être essentiel ne se réduit ni au rôle qu’il joue, ni à l’image qu’il donne. La personne est « la sub-stance (hypo-stase = se tenir sous) individuelle de nature raisonnable (Boèce) ». Elle est une substance unique et originale, qui a cependant la raison en commun avec les substances du même nom. Le Christ, tout en ayant deux natures, n’a qu’une hypostase, c’est à dire ne forme qu’une seule personne.

Chacune des trois Personnes de la Trinité est une hypostase en ce qu’elle est distincte des deux autres. Il y a une seule nature et trois personnes, et ni la nature divine n’existe en dehors des personnes, ni les personnes divines sans la nature divine. Les personnes divines sont des relations subsistantes. Les relations chez les créatures sont des accidents, mais en Dieu, qui est infiniment simple, il n’y a pas d’accident. Dieu est parfaitement simple, Il est un, et ne connaît aucune distinction entre substance et accident. Tout en Lui est la substance divine elle-même. Par exemple, en Dieu la paternité est la substance divine elle-même et la filiation est la substance divine elle-même, c’est Dieu Lui-même qui est Sa paternité et sa Filiation. Est-il possible qu’une relation ne soit pas un accident comme c’est le cas chez les créatures mais soit la substance divine elle-même ? Nous ne pouvons pas comprendre, bien que cela ne recèle aucune contradiction, qu’une relation ne soit pas un accident mais soit la substance divine elle-même. Comme tout ce qui touche à l’être lui-même la notion de relation n’est ni univoque ni équivoque, mais analogue.
La distinction entre substance et accident peut être utilisée d’une autre manière encore concernant la théologie de la Trinité. Chez l’homme, pensée et amour sont des accidents dont la substance de l’homme est le sujet. Il n’en est évidemment pas ainsi en Dieu. Il ne faut donc pas s’étonner que la pensée de Dieu soit Dieu né de Dieu en Qui Dieu S’exprime, c’est à dire Fils, et que l’élan d’amour en Dieu soit Dieu spiré par Dieu en Qui Dieu Se donne, c’est à dire Saint-Esprit.

B.      La Sainte Trinité ne peut être connue ici-bas que par une révélation, à recevoir dans la Foi. Dieu n’a pas voulu nous mettre tout de suite en présence de Sa splendeur irrésistible, Il nous laisse le temps de Le choisir, de marcher librement à Sa rencontre. C’est pourquoi la vie avec la Sainte Trinité, ici-bas, est essentiellement une vie de Foi. Il nous faut demander sans cesse que la grâce de la Foi nous soit donnée, conservée, accrue (Mc 9.24 ; Lc 17.5). La grâce de la Foi est une élévation, une dilatation de notre intelligence et de notre cœur, nous ouvrant à l’accueil de la Révélation surnaturelle.

C.      Outre la Foi, fondamentale, l’Espérance théologale nous est nécessaire pour chercher à pénétrer le mystère de la Sainte Trinité. En effet, pour que la Foi en la Sainte Trinité s’exerce et se développe, il faut des motions d’amour qui dépassent ce qu’exige la simple adhésion au dogme. Pour s’attacher d’une manière vraie, vitale au mystère de la Sainte Trinité, et le pénétrer, il faut un autre amour que l’amour naturel de connaître, un amour surnaturel de désir qu’est l’espérance théologale. Demandons dans la prière que soit augmenté notre espoir d’entrer dans l’intimité de Dieu.
Pour que l’espoir demeure tendu vers un bien difficile, il faut à la fois que celui-ci soit aimé comme un bien de valeur, et que, si ardu qu’on le sente, il soit cependant jugé possible à atteindre. La révélation chrétienne nous convainc que Dieu nous appelle à trouver en Lui notre bien et qu’Il est là pour nous rendre ce Bien infini accessible. « Pour aller à Dieu il faut croire qu’Il est », mais pas de n’importe quelle manière enseigne l’Epître aux Hébreux, il faut croire « qu’Il est la récompense de ceux qui Le cherchent, Lui (He 11.6) » Chercher Dieu, le Bien infini qui veut Se donner, telle est l’espérance chrétienne. Pour que cette espérance soit exercée, il faut que soient produits et multipliés des actes intérieurs d’aspiration à la rencontre avec Dieu. Il faut qu’avec foi nous entretenions en nous le désir du Ciel, de la rencontre finale avec Dieu que nous verrons face à face, tel qu’Il est … La Révélation nous a instruits du mystère de la Sainte Trinité que pour qu’il nous soit possible de commencer à vivre en société avec les Personnes divines, dès maintenant. Mettre en Dieu son espérance signifie, selon l’ensemble de la Bible (Ps 72/73 ; Is 52.8), que Dieu Lui-même est le Bien suprême que nous espérons, comme Lui-même aussi est notre secours pour L’atteindre.

D.      Enfin, seule la divine amitié, la charité, nous établit en société avec les personnes divines. La charité est un amour d’amitié qui épanouit ici-bas l’amour de désir qu’est l’espérance. Elle nous porte à dépasser sans cesse l’intérêt que nous portons à nos occupations et besoins terrestres pour prendre soin de notre prochain. Très certainement l’intimité avec Dieu rend plus libres, plus joyeux, plus calmes, plus aimants surtout, donc plus perspicaces et plus forts pour accomplir ici-bas nos devoirs.

Pourrait-il être possible d’être chrétien sans méditer sur le mystère de la Trinité ? Le Christ est-Il venu pour principalement nous aider à bien vivre en ce monde, ou pour nous donner la vie éternelle, qui, comme toute vie, est relation ?

Un seul Dieu en trois Personnes

Depuis ce pluriel des premiers mots de la Genèse « Faisons l’homme à notre image » jusqu’à la vision de l’Apocalypse où le Père et l’Agneau (le Fils) siègent ensemble sur le trône céleste d’où sort le fleuve de Vie (l’Esprit), toute la Révélation chrétienne est enclose dans le mystère insondable de la Sainte Trinité, mystère de l’intériorité divine, inaccessible à toute intelligence créée, à moins que Dieu ne la communique. C’est pourquoi saint Jean écrit :« Dieu, personne ne L’a jamais vu, mais le Fils unique qui est dans les profondeurs du Père nous L’a fait connaître (Jn 1.18) » Jésus dit Lui-même : « Nul n’a vu le Père sinon Celui qui vient de Lui (Jn 6.46) », et : « Vous ne connaissez ni Moi ni mon Père ; si vous Me connaissiez, vous connaîtriez aussi mon Père. (8.19) »

Un mystère n’est pas une chose absurde, inacceptable à la raison, mais une lumière supérieure à la capacité de notre intelligence, semblable à celle du soleil qui illumine tout mais que nos yeux ne peuvent fixer. Si la théologie ne peut pas nous faire comprendre le Mystère de la Trinité, ce qui est réservé à la Foi, elle pourra cependant nous faire comprendre les formules en lesquelles le Mystère est enseigné et nous montrer qu’elles ne recèlent aucune contradiction, sans quoi nous ne pourrions pas y croire. Il ne faudrait donc pas penser que l’explication théologique fera comprendre le Mystère de la Trinité, elle fera bien au contraire comprendre pourquoi on ne peut pas le comprendre, et comment, pour incompréhensible qu’il soit, il n’est ni contradictoire ni absurde. Il serait par exemple contradictoire de dire qu’il y a en Dieu une nature et trois natures, ou une personne et trois personnes, ce que nous ne disons pas, mais il n’est nullement contradictoire, bien que cela demeure incompréhensible, de dire qu’il y a en Dieu une nature et trois personnes.

Profitons de cette retraite pour prendre conscience de la présence de Dieu, que la Trinité nous habite et que nous sommes en Elle, étant unis au Fils, ayant reçu leur Esprit. Spécialement lorsque nous ferons le signe de la Croix, que nous dirons la doxologie… Considérons avec des yeux neufs notre vocation d’enfant de Dieu, et prenons la mesure des exigences spirituelles et morales qui découlent de notre participation à la nature divine (2 P.1.4).

Approches du Mystère

Certains diront que la Sainte Trinité n’a rien d’original puisqu’il existe déjà, en d’autres religions, des triades de dieux (Brahmâ, Vishnu et Shiva ; Amon, Rah et Phta ; Odin, Thor et Wathan ; Jupiter, Mars et Quirinus …). Or, aucune de ces religions n’a jamais proposé la foi en un Dieu à la fois un et trine … Comment néanmoins comprendre cette ressemblance, sinon comme une intuition de la réalité cachée au cœur de l’être, attestation de la vérité de la Révélation chrétienne ?

C’est bien évidemment dans l’Histoire du Salut que le mystère de la Trinité s’est fait connaître aux hommes, du premier au dernier livre de la Bible : Cf. Gn. 1.1-3 : Dieu parle à la première personne du pluriel … alors que le pluriel de majesté n’existe pas en hébreu, et que le verbe « créer » ne peut avoir qu’un seul sujet …) ; 1.26 ; 3.22 ; 11.7 ; 18.1s ; Ps 2.7 ; Ps 110 ; Si 24 ; Pr 8 ; Is 6+ : « Saint ! Saint ! Saint ! Le Seigneur ! » ; Lc.1.35 : « Le Saint Esprit viendra sur toi, et la puissance du Très Haut te couvrira de son ombre. C’est pourquoi le saint enfant qui naîtra de toi sera appelé Fils de Dieu. » ; le Baptême de Jésus : « Dès que Jésus eut été baptisé, Il vit l’Esprit de Dieu descendre sur Lui comme une colombe. (Mt 3.16) », Jn.14.25 ; Jn 19.30 Lc 23.46 : « Jésus s’écria d’une voix forte : Père, je remets mon esprit entre tes mains. » ; Mt.28.18 : « Allez, de toutes les nations, baptisez au Nom (singulier) du Père, du Fils et du Saint-Esprit. » ; 2 Co. 13.13 ; « La grâce du Seigneur Jésus … » ; Ga 4.6 : « Dieu a envoyé dans nos cœurs l’Esprit de Son Fils qui crie : Abba, Père » ; Ap 22.1 (le Père et l’Agneau (le Fils) siègent ensemble sur le trône céleste d’où sort le fleuve de Vie (l’Esprit) …

La Trinité à la source de la création

L’Eglise enseigne à la suite de saint Paul (Rm 1.19+) que l’existence de Dieu est une vérité accessible à la raison. Les principaux chemins pour y parvenir sont les suivants : 1) Le bonheur, qui rime avec toujours, or rien ici-bas n’est éternel … ; 2) La naissance et la mort échappent à chacun : preuve qu’il n’est pas le maître de sa vie, et que donc quelqu’un d’autre en est le maître ; 3) Le fait de porter des jugements par rapport à des valeurs en soi, immatérielles, spirituelles, éternelles (vérité, justice, beauté, etc.) montre qu’il y a autre chose que l’ordre matériel et fini ; 4) Toute la Création témoigne d’une intelligence et d’une bonté infinies ; 5) Le principe de causalité : Rien ne peut sortir de rien. Or rien n’a chois d’exister. L’univers, comme le montre son entropie, n’a pas toujours existé. Pourquoi y-a-t-il quelque chose plutôt que rien ?

Mettons-nous dans la peau d’un homme qui ne sait rien, comme cela on ne pourra pas nous accuser d’affirmer à partir d’a priori. En regardant le monde, nous pouvons dire qu’aucun être ne s’est donné à lui-même l’existence, donc tous la reçoivent d’un autre, lequel autre existe nécessairement par lui-même. Cet Être qui existe par Lui-même et qui donne à tous d’être, on l’appelle Dieu. Tout ce qui existe rend donc gloire à Dieu du seul fait d’exister. Ceux qui rendent compte de leur existence en désignant leurs parents ne font que reporter sur eux la question de leur origine, mais n’y répondent pas, car elle se pose aussi pour eux … et comme on ne peut remonter ainsi indéfiniment, il faut bien arriver à un commencement sans commencement. Il ne suffit pas en effet de rajouter des wagons au train pour qu’il roule, il lui faut une locomotive ! Quant au fait que Dieu soit unique, cela se prouve de ce que deux dieux se distingueraient par ce que l’un aurait ce que l’autre n’aurait pas, en sorte qu’aucun n’aurait tout, donc aucun ne serait parfait, donc aucun ne serait Dieu, donc Dieu est nécessairement unique (1 Co 8.4). Les hommes sont donc inexcusables de ne pas reconnaître l’existence de Dieu (Rm 1.19 ; Sg 13.1-9), tant elle éclate par tout ce qui est. Il est vrai qu’en raison du péché originel obscurcissant notre intelligence, nous ne parvenons que difficilement à cette connaissance élémentaire (Rm 1.20). Pour autant, comme nous venons de le voir, il n’est pas absolument besoin d’une révélation surnaturelle pour reconnaître l’existence d’un Dieu unique ― et qui plus est après la venue du Christ (14.52) ! Croire en un Dieu unique n’est pas suffisant, chacun peut en effet l’imaginer à sa fantaisie. Saint Jacques a souligné cette insuffisance : « Tu crois qu’il y a un seul Dieu, tu fais bien ; les démons le croient aussi… et ils tremblent ! (Jc 2.19) » L’analogie de l’être et du principe de causalité, permet seulement de savoir que Dieu existe et qu’Il est un, non de Le connaître tel qu’Il Se connaît Lui-même, condition pourtant sine qua non de l’union. « La métaphysique de l’Un est exactement le contraire de la métaphysique de l’Union. (Claude Tresmontant, La finalité de la création, le salut et le risque de perdition, O.E.I.L., 1996, p.83) » Que vient donc faire l’islam, sinon, sous prétexte d’affirmer l’unicité divine, détruire la Révélation de Dieu en Jésus et le salut ? Qui peut venir en effet après le Christ, sinon l’Antichrist ?
Les anciens Babyloniens connaissaient l’existence d’un seul créateur, infini et tout-puissant, de même les premiers Égyptiens, les Goths ou les anciens Hindous, et la plupart des autres nations.

Le Père

Savoir que Dieu existe n’est donc pas si difficile, nous l’avons montré. Et parce qu’Il est l’être qui existe par Lui-même, nous pouvons dire maintenant, sans offenser la raison, qu’en tant qu’Il ne dépend que de Lui-même pour exister, Il est son propre père, Père en un sens absolu, de Lui-même et par Lui-même … Sans cesser de considérer que Dieu est l’être absolument immuable, nous pouvons dire, par analogie avec l’être créé en devenir, que Dieu S’engendre éternellement Lui-même, qu’Il est donc son propre Père, Père de Lui-même et en Lui-même. Il est LE Père. Père en un sens absolu, comme nous ne pouvons pas le comprendre, car nous n’avons pas d’autre exemple d’une telle paternité. Chez nous, en effet, la paternité ne s’identifie pas à l’être : un homme peut exister sans être père. Tandis qu’en Dieu, être et être Père s’identifient. C’est ce que Jésus nous a enseigné en magnifiant le titre de Père (Mt 23.9). « C’est pourquoi je fléchis les genoux en présence du Père de qui toute paternité, au Ciel et sur la terre, tire son nom. (Ep 3.14-15) » Le fait que chacun soit fils n’appelle-t-il pas à reconnaître que Dieu est Père ?

Les hommes et les anges ont été appelés à être en quelque sorte leur propre père puisque leur être en devenir est confié à leur liberté. C’est ainsi que qui fait le bien devient bon et bienheureux, et que qui fait le mal se rend mauvais et malheureux. Chacun s’engendre lui-même dans le bonheur ou dans le malheur. N’est-ce pas là une marque de fabrique témoignant que notre Créateur est Lui-même Père ?

Si Dieu n’est pas Père, alors la fraternité universelle est sans fondement, vouée à n’être jamais qu’une vaine et cruelle aspiration ! L’homme pourrait-il avoir une aspiration et des désirs plus beaux que ceux de son Créateur ?

Le Fils

S’il n’est donc pas contraire à la raison d’admettre que Dieu soit Père (Ml 1.6), en un sens absolu, il faut alors nécessairement admettre que Dieu est aussi Fils, aussi vrai qu’il n’y a pas de père sans fils ! Et en effet, si Dieu est cet Être qui S’engendre éternellement Lui-même, on peut bien distinguer en Lui l’Être qui engendre et Celui qui est engendré … c’est Le même, mais il y a en Lui comme la place pour les deux termes du mouvement par lequel Il advient éternellement à Lui-même. On peut donc accepter de distinguer en Dieu l’Engendrant et l’Engendré, le Père et le Fils, ensemble un seul et même être et Dieu. La production par mon intelligence d’une pensée avec laquelle elle ne s’identifie pas ne remet pas en cause son unicité, au contraire, elle la prouve ! Notre intellect ne cesse pas d’être un avec son acte de penser et l’espèce en laquelle il se pense. À fortiori, on peut accepter de penser que la procession d’une personne en Dieu ne nie pas l’unicité de la nature divine. Dieu a un Fils comme l’intelligence qui se pense engendre une pensée qui la réfléchit (Sg 7.22-30). Le Fils est la connaissance que Dieu a de Lui-même : « Qui Me voit, voit Le Père (Jn 12.45 ; 14.9) » ; « Le Père est en Moi et Moi dans le Père (Jn 14.10) » dit Jésus. C’est pourquoi le Fils est encore appelé l’Image de Dieu invisible (2 Co 4.4 ; Col 1.15), la Parole de Dieu (Col 1.16 ; He 1.3), Le Verbe de Dieu (Jn 1.1,9,14 ; 1 Jn 1.1 ; Ap 19.13). Dieu, pourrait-Il ne pas Se connaître ? Dieu pourrait-Il être dépourvu de conscience alors qu’Il nous en a donné une ? Si Dieu ne Se connaissait pas Lui-même, Il ne connaîtrait rien, et ne serait pas Dieu. Dieu Se pense Lui-même. La Pensée par laquelle Dieu Se connaît, Le dit si bien qu’Elle est un autre Lui-même tout en étant un même être avec Lui, de même nature que Lui, qui est appelée le Fils, parce que le Fils révèle le Père (Jn 12.45 ; 14.9) comme la pensée révèle l’intelligence. Dans la connaissance que Dieu a de Lui-même, le sujet connaissant et l’objet connu s’identifient, et en Se connaissant Lui-même, Dieu connaît aussi toute chose. Son Être est pure transparence à Lui-même, Il est lumière (1 Jn 1.5 ; Jn 8.12) en qui tout est connu. La pensée que Dieu a de Lui-même est elle-même Dieu. Le Fils est la Pensée par laquelle Dieu Se connaît comme Père de Lui-même. Dieu Se connaît donc en Se disant par un Verbe éternel qui, tout en Se distinguant de Lui, ne fait cependant qu’Un avec Lui (Jn 10.30). « Comme la rosée naît de l’aurore, Je T’ai engendré. (Ps 109.3b) » Aristote avait déjà trouvé que « dans ce qui est séparé de la matière, le pensant et le pensé sont identiques. (De l’âme, Livre III, 430a3-4, in saint Thomas d’Aquin, Somme contre les Gentils, II, 82) » C’est parce que Jésus est le Verbe de Dieu qui, en Dieu, dit Dieu, qu’il Lui revenait, parmi les Personnes divines, de nous révéler le Mystère de Dieu (Mt 11.27 ; Jn 7.29 ; 8.19).

Dieu Se connaît. Il y a donc en Dieu, Dieu et la Connaissance que Dieu a de Lui-même, encore appelée : le Verbe, le Fils de Dieu. Un être qui n’est pas Dieu ne peut absolument pas exprimer tout ce qu’est Dieu. Pour dire parfaitement tout ce qu’est Dieu il faut être Dieu. Dieu seul exprime totalement ce qu’est Dieu : donc être Verbe ou Image de Dieu, c’est être Dieu parce que la connaissance de Dieu, c’est Dieu Lui-même parfaitement transparent à Lui-même dans la pure identité de Son Être infini. Dieu seul peut connaître parfaitement qui est Dieu, aussi le Verbe de Dieu est-Il nécessairement Dieu Lui-même.

Ceci revient à dire que le Verbe est « Dieu engendré de Dieu » (Credo de Nicée) car engendrer signifie bien donner naissance à un être de même nature que soi. Comment exprimer cela autrement qu’en disant que le Verbe est Fils de Dieu, et que Dieu qui L’engendre est par là Père ? Quand un menuisier fait un table, c’est son œuvre ce n’est pas son fils : il ne lui a pas communiquée sa nature humaine. Mais quand un homme engendre un autre homme, c’est son fils : il lui a communiqué sa nature humaine. Le Verbe à qui Dieu communique toute Sa nature divine en s’exprimant parfaitement et totalement en Lui est par là engendré, et non pas fait, vrai Fils. Ceci est confirmé par tout le Nouveau Testament qui parle sans cesse du Père et du Fils comme de deux personnes distinctes en relation entre elles.

La génération humaine a deux limites :

  • Elle n’est produite qu’à un moment du temps, et le nouvel être n’est pas “consubstantiel” : ce n’est pas toute la vie humaine qui est en un fils des hommes. En Dieu est la vraie génération spirituelle, qui n’a pas les imperfections de la génération humaine : le Verbe de Dieu est Fils consubstantiel au Père, et éternel. « Moi et le Père, Nous sommes Un (Jn 10.30) » ; « Et le Verbe est Dieu. (Jn 1.1) » Quand un homme a engendré un fils, ils ont tous deux la nature humaine, mais ce sont deux hommes, c’est à dire deux substances distinctes. Dieu étant unique, le Père et le Fils sont deux personnes réellement distinctes, mais un seul Dieu. Ils sont non seulement de même nature divine, mais une seule et même substance divine, et non pas deux substances comme le sont deux hommes. C’est là ce qu’exprime le Credo de Nicée en disant du Fils qu’Il est « consubstantiel » au Père. Le Père et le Fils sont donc l’un et l’autre toute la perfection divine indivise sans partage entre eux : une seule Éternité, une seule Toute-puissance, un seul Créateur, une seule Intelligence divine, une seule Volonté divine. Ainsi tout ce que le Père est comme Dieu, le Fils engendré par Lui l’est pareillement : « Tout M’a été donné par mon Père » (Mt 11.27 ; Lc 10.22) ; « Tout ce qu’a le Père est à Moi » (Jn 16.15) ; « Je ne fais rien de Moi-même mais Je dis ce que le Père M’a enseigné » (Jn 8.28) ; « Comme le Père a la Vie en Lui-même, ainsi a-t-Il donné au Fils d’avoir la Vie en Lui-même » (Jn 5.26) ; « Qui M’a vu a vu le Père » (Jn 14.9) …

 

  • Le Père et le Fils Se distinguent par la réciprocité de leurs relations de paternité et de filiation, le Père est Père par rapport au Fils, et le Fils est Fils par rapport au Père, en dehors de cela ils sont de manière absolue l’unique perfection divine sans division ni partage, d’où cette affirmation fondamentale qu’il n’y a de distinctions entre les Personnes divines que dans la réciprocité de leurs relations. Le Père comme personne distincte du Fils n’a à Lui que Sa paternité, et le Fils comme personne distincte du Père n’a à Lui que Sa filiation : pour tout le reste Ils sont identiques. Ceci entraîne une grande différence avec l’espèce humaine où entre un père et un fils il y a, même s’ils se ressemblent beaucoup, d’autres différences que celle d’être père et fils, par exemple de ne pas avoir le même âge, mais entre Dieu le Père et Dieu le Fils il n’y a aucune autre différence que celle d’être Père et Fils. Ce que le Père donne à son Fils, c’est bien tout Lui-même, en ne réservant pour Lui que Sa relation de paternité. (Les notions de paternité et de filiation ici employées ne sont ni univoques ni équivoques mais analogues). Expression parfaite de Dieu, le Fils est l’expression de Sa Volonté créatrice de sorte que toutes les créatures sont conçues en Lui, d’où la formule de saint Jean « Tout fut par Lui et sans Lui rien ne fut (Jn 1.3) », ou celle de saint Paul « c’est en Lui qu’ont été créées toutes choses, dans les cieux et sur la terre, les visibles et les invisibles (Col 1.16) ». Les relations ne portent absolument pas atteinte à l’unité divine, comme l’explique le Vle Concile du Latran (1215) : « Chacune de ces trois Personnes EST cette réalité, c’est à dire la substance, l’essence ou la nature divine. » La distinction et la compénétration des trois Personnes divines ne s’ajoutent pas à leur unité mais en sont l’expression. Le monothéisme trinitaire, typique du Christianisme, reste un mystère inaccessible à la raison humaine. Dieu n’est pas un être solitaire, “Dieu est amour”, cela veut dire qu’Il est Relation, Don. Dans l’amour, il y a celui qui aime, celui qui est aimé, et le lien qui les unit.

De l’Esprit-Saint

Dieu existant par Lui-même, rien en Lui n’est à l’état de potentialité : Il est Acte pur. Or, tout acte est constitué de deux termes et de leur relation, par exemple : celui qui donne, celui qui reçoit, et le don qui les unit. En tant qu’Acte, Dieu est donc nécessairement trine.

Comment Dieu aurait-Il créé s’il n’y avait pas eu de sa part libre décision de le faire ? Y aurait-il volonté, liberté, amour chez les créatures, et pas en Dieu ? Un être qui n’aimerait pas parfaitement le Bien parfait ne serait pas parfaitement bon, donc le Bien parfait est Amour parfait de Lui-même. Il manquerait quelque chose à l’Être parfait s’Il n’était pas parfaitement aimé : Dieu est donc Acte parfait d’Amour de Lui-même. Aucun égoïsme en cela puisque cet amour ne va pas à un être fini s’enfermant dans ses limites mais à l’Être Infini … L’Être divin est Amour comme Il est Connaissance (Parole, Verbe) parce qu’étant par Lui-même actuellement et parfaitement aimé Il est par Lui-même Acte d’Amour sans qu’il y ait en Lui aucune distinction de sujet aimant et d’objet aimé. C’est l’identité de l’Être divin avec Lui-même d’être Connaissance parfaite de Lui-même, Amour parfait de Lui-même. Telle est la vie purement spirituelle de Dieu.

Entre le Père et le Fils, il n’y a pas rien, il y a l’Amour par Lequel le Père engendre le Fils et par Lequel le Fils aime en retour le Père du même Amour dont Il est aimé. La relation qui unit l’Engendrant et l’Engendré, l’Engendrement, par lequel le Père donne au Fils d’être Fils, et le Fils donne au Père d’être Père, est leur Amour mutuel, l’Esprit-Saint, l’Esprit du Père ET du Fils, un seul et même Dieu avec Eux … Le Père est l’Amour qui donne, le Fils, l’Amour qui Se donne, l’Esprit-Saint, l’Amour donné, le Don, la Personne-Don, comme l’appelait saint Jean-Paul II. Notre vie d’amour consiste dans un élan, un entraînement intérieur vers l’être aimé, et c’est là ce que l’on appelle quelque fois « un esprit » (même mot pour dire : principe de vie, vent, souffle). On dit parfois de quelqu’un qu’il a « l’esprit de famille » pour dire qu’il y a en lui un mouvement intérieur qui le porte vers tout ce qui touche au bien de la famille.

Si Dieu est l’Être parfait totalement transparent et lumineux pour Lui-même, en son infinité d’être et de perfection, Intelligence parfaite de Lui-même, et aussi le Bien parfait S’aimant et Se possédant parfaitement Lui-même en son infinie bonté, alors, dans la plénitude et la véhémence de Son être, Il est la Joie absolue, infinie, parfaite.

Il faut donc en conclure que le Père S’exprimant parfaitement dans le Fils et le Fils exprimant parfaitement le Père, le Père et le Fils sont portés, entraînés l’un vers l’autre, donnés, liés l’un à l’autre, par un mutuel Élan et Don d’amour de Dieu pour Dieu, qui ne peut être tel que parce que Lui-même est Dieu, Dieu comme le Père et le Fils, en parfaite égalité et identité de nature et de substance avec Eux, formant avec Eux un seul Dieu, une seule substance divine, une seule éternité, une seule toute-puissance, un seul Créateur, une seule Intelligence divine, une seule Volonté divine, donc ne Se distinguant d’Eux que par Sa relation à Eux, qu’en procédant d’Eux comme leur amour mutuel. Pour aimer parfaitement tout ce qu’est Dieu il faut être Dieu, parce que l’amour de Dieu, c’est Dieu Se possédant Lui-même dans la pure identité de son Être infini : donc le Saint-Esprit est Dieu, mais parce que Dieu ne S’aime parfaitement qu’en Se connaissant et en S’exprimant parfaitement Lui-même, Il est Dieu procédant du Père S’exprimant dans le Fils et du Fils exprimant le Père. L’Esprit est comme la “respiration”, le “souffle” qui circule entre le Père et le Fils et attise entre eux le feu de l’Amour trinitaire. Le Père donne, le Fils reçoit, l’Esprit-Saint est le Don, l’Amour. Lorsque Dieu crée l’homme à Son image, Il le crée précisément homme et femme. De même que le Fils Se reçoit du Père, Ève est tirée du côté d’Adam. Elle est l’image du Fils comme Adam est celle du Père. Et lorsque tous les deux ne feront qu’un, un fera trois, leur amour prenant le visage de leur enfant.

Deux “Je” qui disent “Nous”, telle est la vie de Dieu, de toute éternité, et c’est ce qu’ll nous appelle à réaliser avec Lui, pour que nous soyons parfaits comme Il est parfait : que « Dieu soit tout en tous (1 Co 15.28) ».

C’est parce que Dieu surabonde en Lui-même qu’ll peut, librement, surabonder en dehors de Lui-même en créant d’autres êtres. Parce que Dieu est capable de faire exister un autre que Lui, cela revient à affirmer la possibilité, et même la convenance, de la Création. Dieu a créé le monde, non par besoin d’un complément, ni même par distraction, mais gratuitement, par Amour, pour l’Amour, en mettant au sommet de la création des personnes créées à son image, appelées à partager éternellement son Amour. L’existence de Dieu et la nôtre sont étroitement imbriquées, nonobstant tout le travail du Démon et du monde apostat cherchant à les séparer pour nous perdre.

Voici un exposé parfait de la foi de l’Église au sujet de la Trinité :

« La sainte Église romaine, établie par la parole de notre Seigneur et Sauveur, croit fermement, professe et enseigne un seul vrai Dieu, tout-puissant, immuable et éternel, Père, Fils et Saint-Esprit, un dans son essence, trine dans ses personnes : le Père inengendré, le Fils engendré du Père, le Saint-Esprit procédant du Père et du Fils. Le Père n’est ni le Fils ni le Saint-Esprit ; le Fils n’est ni le Père ni le Saint-Esprit ; le Saint-Esprit n’est ni le Père ni le Fils. Mais le Père n’est que le Père ; le Fils que le Fils ; le Saint-Esprit que le Saint Esprit. Seul le Père a engendré le Fils de sa substance ; seul le Fils est engendré du Père ; seul le Saint-Esprit procède du Père et du Fils. Ces trois Personnes sont un seul Dieu et non trois dieux.
Les trois ont une substance, une essence, une nature, une divinité, une immensité, une éternité et tout est un [en eux], là où l’opposition constituée par les relations le permet. À cause de cette unité, le Père est tout entier dans le Fils, tout entier dans le Saint-Esprit ; le Fils est tout entier dans le Père, tout entier dans le Saint-Esprit ; le Saint-Esprit tout entier dans le Père, tout entier dans le Fils. Aucun ne précède l’autre en éternité, ne dépasse l’autre en grandeur, ne surpasse l’autre en puissance. De toute éternité et sans commencement, le Fils a son origine du Père ; de toute éternité et sans commencement, le Saint-Esprit procède du Père et du Fils.
Tout ce qu’est ou a le Père, il ne l’a pas d’un autre, il est principe sans principe. Tout ce qu’est ou a le Fils, il l’a du Père, il est principe du principe. Tout ce qu’est ou a le Saint-Esprit, il l’a à la fois du Père et du Fils. Mais le Père et le Fils ne sont pas deux principes du Saint-Esprit, mais un principe. De même que le Père et le Fils et le Saint-Esprit ne sont pas trois principes, mais un principe des créatures (Bulle Cantate Domino d’Eugène IV, Décret pour les Jacobites, 1442). »

LE DOGME

La foi chrétienne dans le Mystère de la Trinité se résume en 5 points :

_ Une seule nature : une seule substance (donc un seul Dieu), une seule intelligence, une seule volonté, une seule perfection divine sans division ni partage.

_ Deux processions : la procession intellectuelle qui est génération du Fils et la procession d’amour qui est spiration du Saint-Esprit.

_ Trois personnes : le Père, le Fils et le Saint-Esprit.

_ Quatre relations : la paternité qui est le propre au Père, la filiation qui est propre au Fils, la relation au Saint-Esprit qui est commune au Père et au Fils, la relation propre au Saint-Esprit qui est Sa relation au Père et au Fils comme à son unique Principe.

_ Cinq notions : les quatre relations que nous venons d’énumérer, plus l’innascibilité du Père, qui ne procède d’aucun autre.

 

 

Note : Je dois beaucoup pour la compréhension du mystère de la Sainte Trinité à Jean Daujat, Doctrine et vie chrétienne, Téqui.