Ce tableau, peint par Jan Matejko au XIXe siècle, illustre la victoire de Jan III Sobieski, roi de Pologne, contre les Turcs à la bataille de Vienne. Près du roi, à gauche, le moine capucin Marco d’Aviano porte une statue de la Vierge rappelant que c’est sous sa protection que Jan III se plaça avant d’engager la bataille.

Apparue en Espagne au XIVe siècle, la fête du saint Nom de Marie va s’étendre petite à petit à toute la chrétienté en 1683 par le pape Innocent XI. La raison ? En action de grâce pour la délivrance de Vienne assiégée par les Turcs au cours de la même année. En effet, en juillet 1683, plusieurs milliers de Turcs avançaient vers Vienne, menaçant l’Europe toute entière. Le grand vizir, fort de 300.000 hommes, se promettait de prendre non seulement Vienne, mais Belgrade, Buda, de déboucher en Italie et d’arriver à Rome, à l’autel de saint Pierre ! Il y a précisément 342 ans. 

Tandis que la Hongrie se révoltait contre les Habsbourgs, les trois cent mille hommes des armées turques conduites par le grand vizir de Mehmed IV, Kara Mustapha Pacha, et guidées par le comte hongrois et protestant Tököly, bloquaient Vienne depuis le 14 juillet 1683. L’empereur Léopold I° (1640-1705) et son beau-frère, Charles de Lorraine, avaient déserté la ville où treize mille hommes attendaient sous le commandement du comte de Sarhenberg. Innocent XI qui eût voulu former une ligue catholique contre les Turcs, ne put compter que sur l’alliance de Jean III Sobieski (1624-1696), roi de Pologne depuis 1674, que l’on joignit lors d’un pèlerinage à Chestokowa dont il partit le 15 août. Le roi de Pologne, sur les conseils du bienheureux capucin Marco d’Aviano, accepta de porter secours à la ville. Sur le Kahlenberg qui domine la ville au nord, le dimanche 12 septembre 1683, le P. Marco célébra la messe, servie par le roi Sobieski devant l’armée disposée en demi-cercle. Le Capucin prédit une victoire inouïe. Et au lieu de terminer la Messe en disant les paroles liturgiques : « Ite missa est », il cria : « Ioannes vinces ! » « Jan vaincra » !  Après avoir servi la Messe et communié, Jean Sobieski arma son fils chevalier et prit le commandement de l’armée catholique où, en plus de ses troupes polonaises, il y avait celles du duc de Lorraine et du prince de Waldeck. Ils se mirent sous la protection de Marie. Se levant plein d’ardeur après la consécration, le roi déclara : « Aujourd’hui, s’écria-t-il, il y va tout ensemble de la délivrance de Vienne, de la conservation de la Pologne et du salut de la chrétienté entière ! Marchons sous la toute-puissante protection de la Mère de Dieu ! » Son espoir ne fut pas trompé :  battus à Kahlenberg les Turcs prirent la fuite le 12 septembre. Dans Vienne délivrée, Jean Sobieski vint se prosterner avec ses généraux devant la statue de Notre-Dame de Lorette vénérée dans l’église des Augustins où l’on chanta un Te Deum ; ce jour-là, on avait fait à Rome une grande procession suivie, malgré sa goutte, par la pape ; le 24 septembre, le cardinal-vicaire prescrit des sonneries de cloches et des prières d’action de grâces et, le 25 novembre, un décret établissait la fête du Saint Nom de Marie et l’assignait au dimanche dans l’octave de la Nativité de la Bienheureuse Vierge. Innocent XIII étendit la fête du Saint Nom de Marie à l’Eglise universelle en 1721. Mais sait-on que les Autrichiens ont renoncé à édifier sur la place Kahlenberg le monument à la gloire de Jean III Sobieski et de la victoire sur l’Empire ottoman, de peur des réactions des islamistes demeurant en Autriche ? (( Une statue équestre de 8 mètres de haut conçue par le sculpteur polonais Czeslaw Dzwigaj, était prévu depuis 2013 pour commémorer la victoire de Sobieski lors de la bataille de Vienne en 1683, où ses troupes polonaises ont contribué à lever le siège ottoman. Le site choisi était le Kahlenberg, colline stratégique d’où Sobieski lança son assaut décisif. La Pologne avait financé entièrement le projet (environ 1 million d’euros), mais le 7 novembre 2024, la conseillère municipale à la Culture Veronica Kaup-Hasler (SPÖ, parti social-démocrate au pouvoir à Vienne) a annoncé l’annulation définitive du projet. La présence d’un fort pourcentage de musulmans, turcs essentiellement n’y est sans doute pas pour rien … )) 

La tradition veut que les boulangers de Vienne, qui par définition se lèvent très tôt, avaient donné l’alerte lorsqu’ils entendirent le bruit fait par les Turcs qui creusaient des tunnels sous les murailles de Vienne pour investir la ville par surprise. En récompense l’empereur d’Autriche leur aurait accordé le privilège de célébrer l’évènement en créant une pâtisserie à laquelle ils donnèrent la forme d’un croissant. 

Célébrée le dimanche durant l’octave de la Nativité de la Vierge, entre le 8 et 15 septembre, la fête fut définitivement fixée le 12 septembre par le pape Pie X en mémoire de l’anniversaire de la victoire. En 1970, après le Concile Vatican II, la fête est supprimée puis finalement rétablie en 2002 par le pape Jean Paul II. On sait toute l’affection que le souverain pontife portait à la Vierge comme en témoigne sa devise, « Tout à Toi, Marie », abréviation de la forme la plus complète de la consécration à la Mère de Dieu : « Je suis tout à toi et tout ce qui est à moi est à toi. Je te reçois dans tout ce qui est à moi. Prête-moi ton cœur, Marie ! » 

« Le nom seul de Marie met en fuite tous les démons ! », disait saint Bernard. Béni et invoqué par tous les chrétiens du monde entier, le nom de la Vierge Marie suffit à lui-seul à réconforter les fidèles. Un nom devenu si célèbre que c’est aujourd’hui le prénom féminin le plus donné au monde. Il est fêté chaque année par l’Église catholique le 12 septembre. Au cours des siècles, de nombreux saints ont honoré le nom de Marie. Saint Ambroise de Milan (+397) écrivait : « Votre nom, ô Marie, est un baume délicieux qui répand l’odeur de la grâce ! » Saint Bernard de Clairvaux (+1153 ) y voyait un refuge dans le combat spirituel : « Le seul nom de Marie met en fuite tous les démons ! ». Quant à saint Bonaventure (+1274), il invoquait la la Vierge en disant : « Que Votre nom est glorieux, ô sainte Mère de Dieu ! Qu’il est glorieux, ce nom qui a été la source de tant de merveilles ! » En septembre 2010, le pape Benoît XVI recommandait l’invocation du Nom de Marie pour la conversion des baptisés : « À la Vierge Marie, dont le Très Saint Nom est célébré aujourd’hui dans l’Église, nous confions notre chemin de conversion à Dieu. »

Marie,
En la suivant, on ne dévie pas.
En la priant, on ne désespère pas.
En pensant à elle, on ne se trompe pas.
Si elle te tient par la main, tu ne tomberas pas.
Si elle te protège, tu ne craindras pas.
Si elle est avec toi, tu es sûr d’arriver au but.
Marie est cette noble étoile dont les rayons illuminent le monde entier,
dont la splendeur brille dans les cieux et pénètre les enfers.
Elle illumine le monde et échauffe les âmes.
Elle enflamme les vertus et consume les vices.
Elle brille par ses mérites et éclaire par ses exemples.
Ô toi qui te vois ballotté au milieu des tempêtes,
ne détourne pas les yeux de l’éclat de cet astre si tu ne veux pas sombrer.

Si les vents de la tentation s’élèvent, si tu rencontres les récifs des tribulations,
regarde l’étoile, invoque Marie.

Si tu es submergé par l’orgueil, l’ambition, le dénigrement et la jalousie,
regarde l’étoile, crie Marie.

Si la colère, l’avarice ou les fantasmes de la chair secouent le navire de ton esprit,
regarde Marie.

Si, accablé par l’énormité de tes crimes, confus de la laideur de ta conscience, effrayé par l’horreur du jugement,
tu commences à t’enfoncer dans le gouffre de la tristesse, dans l’abîme du désespoir,

pense à Marie.
Que son nom ne quitte pas tes lèvres,
qu’il ne quitte pas ton cœur et pour obtenir la faveur de ses prières,
n’oublie pas les exemples de sa vie.

Saint Bernard (1090-1153),
Sur les gloires de la Vierge Marie,
Homélie II, 17