(Liturgie de la Parole : Is 22 19-23 ; Ps 137 ; Rm 11 33-36 ; Mt 16 13-20)

Mais pour vous, qui suis-Je ?

Aujourd’hui encore, pour beaucoup, la réponse à cette question ne semble pas évidente et même de moins en moins… Ainsi, d’après un sondage réalisé il y a déjà quelques années auprès des agents pastoraux de l’Église en Hollande, 80 % d’entre eux ne croyaient pas à la Présence réelle… 80 % ! Et 94 %, 94 % ! ne croyaient pas à la divinité de Jésus-Christ ! 94 % ! D’après un autre sondage, 40 % des pratiquants en France croient en la réincarnation… Il est bien évident que tous ces gens-là, qui sont pourtant appelés catholiques, ne le sont pas, non seulement parce que l’Incarnation de Dieu en Jésus-Christ présent au Saint-Sacrement est la pierre angulaire de notre foi, mais encore parce que si la foi est une, alors rejeter un seul dogme suffit pour rejeter la Foi elle-même ! Aujourd’hui, comme au temps de Jésus, beaucoup se font une opinion au sujet de Jésus, mais ils n’ont pas la Foi en Jésus, celle confessée par Pierre, qui est une vertu surnaturelle, en soi inaccessible à l’homme qui ne peut connaître ce que Dieu est seul à connaître : qui Il est, et quel est Son dessein à notre sujet, réalités absolument inaccessibles à notre intelligence laissée à ses seules capacités naturelles, mais que nous pouvons croire parce que Dieu nous les révèle, et que Dieu ne peut ni Se tromper ni nous tromper.

Pourquoi l’Islam a-t-il pu conquérir tant de pays autrefois chrétiens ? Parce que ces derniers avaient abandonné la Foi catholique pour accueillir toutes sortes d’hérésies, tandis que leurs conflits politiques les déchiraient et les affaiblissaient. Ainsi tombèrent en 636 et 638 la Syrie et la Palestine qui confessaient l’hérésie nestorienne pour laquelle Jésus est « l’union de deux personnes, divine et humaine », puis, en 642, tomba l’Égypte, devenue monophysite, hérésie pour laquelle « Jésus n’a qu’une nature » ; de 648 à 711 tombèrent la Cyrénaïque, la Tripolitaine et l’Afrique du Nord, devenues donatistes, hérésie pour laquelle notamment la validité des sacrements dépend de la sainteté du célébrant ; en 714 tombe à son tour l’Espagne, devenue arienne, hérésie pour laquelle « Le Fils de Dieu a été tiré du néant, en sorte que Jésus n’est qu’un homme », puis en 719 et 725 vint le tour de la Provence et de la Bourgogne devenues elles-aussi ariennes… Qui stoppa et repoussa l’expansion de l’Islam ? La descendance du roi des Francs, Clovis, restée catholique, seule, au milieu des autres tribus barbares passées à l’arianisme ! Remarquons encore comment le schisme de l’Église d’Orient en 1054 est aussitôt suivi par la chute de l’Empire byzantin en 1071 sous les coups de boutoir des Seldjoukides. Si c’est donc une leçon de l’Histoire qu’une Église malade passe facilement à l’Islam, qu’en sera-t-il de l’Occident aujourd’hui travaillé par l’apostasie massive de la Foi chrétienne ?

Qui donc est Jésus-Christ pour vous ? Je vous le dis : Il n’est pas le grand Sage que vénèrent les philosophes, ni le précurseur des révolutionnaires, ou le premier des socialistes ou des communistes ; Il n’est pas un prophète comme le croient les musulmans, ni une manifestation de la Divinité comme Le considèrent le brahmanisme, le New-Age et tous les courants ésotériques, non plus que le Grand Initié imaginé par la Franc-maçonnerie… Tous ces gens-là ne croient pas que Jésus est Dieu, et c’est pourquoi ils ne sont pas chrétiens… Vénérer Jésus-Christ, ce n’est pas L’adorer… Seule la Révélation fait connaître Qui est Jésus, et seule la Foi Le connaît. C’est pourquoi, personne, en dehors de l’enseignement de l’Église, ne connaît qui est Jésus-Christ, fût-il évêque si pour lui l’essentiel est d’avancer hors de la doctrine (2 Jn 1.9-10) ! Pour ne pas errer au sujet de la Foi en Jésus et guider votre esprit de façon assurée sur le chemin de la contemplation béatifique de Son mystère, je vous invite à retenir quatre vérités, aussi unies entre elles que les quatre directions de Sa Croix :

1. Jésus-Christ est Dieu.

Jésus-Christ est réellement et substantiellement Dieu : non point un homme divinisé par la Grâce, ou participant, par grâce, à la nature divine, mais Dieu par nature, Dieu dans la plénitude de la divinité.

Ce qui nous conduit à le croire ce sont : Ses miracles ; la sublimité de Son enseignement (Il enseigne des mystères que la raison n’aurait jamais pu découvrir) ; la sainteté de vie qu’Il réclame (et dont la réalisation dépasse tout ce dont un homme aurait jamais pu avoir l’idée où à quoi il puisse parvenir par ses seules forces) ; la sainteté et la perfection de Sa propre vie dans le don total de Lui-même (qui force le respect même des non-croyants) ; Sa propre Résurrection ; le témoignage de l’Esprit-Saint dans le cœur des Croyants, le témoignage des Saintes Écritures ; le témoignage de l’Église et des Saints ; le Saint-Suaire, et tant d’autres réalités aussi merveilleuses que méconnues, comme par exemple le miracle de Lanciano, dont je ne comprends pas qu’il ne fasse pas la une de chaque journal télévisé catholique !

2. Jésus-Christ est Homme.

L’Histoire fait foi de l’existence d’un homme, appelé Jésus de Nazareth. Son existence n’est contestée par personne, tant elle est universellement et impartialement attestée. Les Apôtres et ses contemporains L’ont vu Se conduire en homme pendant trente-trois ans, manger, boire, dormir, parler, etc., et mourir. À la Résurrection, pour déjouer l’erreur où étaient tombés les Apôtres qui croyaient voir une apparition ou un fantôme, Il leur demande de Le toucher et de Lui donner à manger. Il est un homme réel qui a repris vie au matin de Pâques.

3. Les deux natures du Christ.

La troisième affirmation de la foi chrétienne concernant Jésus-Christ résulte directement des deux premières : s’Il est réellement Dieu et réellement homme, il y a en Jésus-Christ deux natures, réellement distinctes, la nature divine ET la nature humaine, et étant donné qu’une distance infinie les sépare, il n’y a entre elles ni confusion ni mélange. Et effectivement, dans l’Évangile, on voit Jésus-Christ parler et agir, tantôt comme Dieu et tantôt comme homme. L’hérésie d’Eutychès appelée « monophysisme » n’attribuait à Jésus-Christ qu’une seule nature, en laquelle divinité et humanité étaient confondues. Malheureusement, beaucoup de chrétiens mal instruits sont eux-aussi monophysites sans le savoir : confondant en Jésus-Christ ce qui est de Sa nature divine et ce qui est de Sa nature humaine, ils vous diront par exemple qu’ils croient sans difficulté à la présence de Jésus dans l’Eucharistie puisqu’ils croient qu’Il est Dieu, et que comme Dieu est partout, Il est aussi dans l’Eucharistie ! Ce faisant, ils confondent Sa nature divine par laquelle Il est présent partout, et Sa nature humaine dont la présence est localisée. Or, précisément le miracle de l’Eucharistie est de rendre présente Sa nature humaine !

On ne peut pas lire l’Évangile si on ignore cette vérité, car tantôt le Christ parle selon Sa nature divine, et ainsi Il peut dire : « Le ciel et la terre passeront mais Mes paroles ne passeront point (Mt 24 35) », ou bien « Tes péchés sont pardonnés. (Mt 9 2) », et tantôt Il parle selon Sa nature humaine, et alors Il peut dire que « Nul ne connaît ni le jour ni l’heure de la fin du monde, pas même le Fils (Mt 24 36) », ou bien avoir soif ou peur.

4. L’unité de personne de Jésus-Christ.

Si Jésus-Christ est réellement et substantiellement Dieu ET réellement et substantiellement homme, c’est qu’en Jésus-Christ, les deux natures, divine et humaine, réellement distinctes, sans confusion ni mélange entre elles, appartiennent à un unique Moi, à une seule et unique personne, la deuxième Personne de la Trinité, qui peut dire à la fois et en vérité « Je suis Dieu » et « Je suis homme ». Alors que le Mystère de la Trinité affirme en Dieu trois Personnes en une nature, le Mystère de l’Incarnation affirme deux natures en une Personne. Jésus-Christ n’est donc pas une Personne humaine. Cette vérité de foi a été définie au Concile d’Éphèse qui condamna l’hérésie de l’archevêque de Constantinople, Nestorius, qui voyait en Jésus-Christ deux personnes. Or, ce qui constitue la nature humaine de Jésus-Christ comme personnelle, c’est d’être la nature humaine de Dieu le Fils, et de personne d’autre ! Ce qui serait inacceptable, parce que contradictoire et absurde, serait de dire qu’il y a en Jésus-Christ une nature ET deux natures, ou une personne ET deux personnes, mais ce n’est pas contradictoire de dire qu’il y a en Lui une personne et deux natures, car personne et nature ne sont pas synonymes. Vous et moi avons bien la même nature humaine et pourtant nous ne sommes pas la même personne. Ainsi en est-il de Jésus qui est une personne, divine, ayant assumé en plus de Sa nature divine, la nature humaine. Qu’une nature humaine n’ait pas pour sujet d’attribution une personne humaine mais une Personne divine, est certes incompréhensible, mais n’est pas pour autant contradictoire. Voilà donc les quatre « Nobles Vérités » qu’il faut croire au sujet du Christ pour être chrétien.

Il y a encore beaucoup d’autres merveilles que nous pourrions remarquer dans le Christ, mais considérons maintenant comment c’est à la suite de la Confession de foi de Pierre que Jésus commence à bâtir Son l’Église, et qu’Il l’a bâtie sur Simon devenu pour cela Pierre, pierre de fondation, et pierre d’angle pour assurer la cohésion de l’ensemble de la construction. L’Église est bâtie sur Pierre, parce qu’il a la vraie Foi. L’Église n’est pas autre chose que le rassemblement de ceux qui partagent la Foi de Pierre. Et parce que Jésus n’était pas venu sauver seulement les hommes de sa génération, mais tous les hommes, jusqu’à la fin du monde, Jésus a voulu que Son Église se perpétue jusqu’à Son retour, raison pour laquelle Jésus utilise le futur : « Tu es Pierre, et sur cette pierre Je bâtirai Mon Église. » C’est ainsi qu’en Pierre Jésus incluait ses successeurs, et qu’aujourd’hui encore parmi toutes les fausses Eglises qu’a suscitées Satan au long des âges pour disperser les enfants de Dieu et les perdre avec lui, toute âme droite qui cherche quelle est la vraie Eglise du Christ, peut discerner dans la succession des papes, le fil rouge qui relie à travers l’histoire l’Église d’aujourd’hui à sa fondation par Jésus. Le Pape, comme l’enseigne le Catéchisme, est ainsi « le principe perpétuel et visible et le fondement de l’unité » de l’Église (n°882). Ayant la foi d’un seul, l’Eglise peut réaliser la prière de Jésus : « Père, qu’ils soient un comme Nous sommes Un, afin que le monde croit que Tu M’as envoyé (Jn 17 21). »

Qui ne s’en aperçoit : aujourd’hui, dans une large mesure, le sens authentiquement catholique de la réalité « Église » disparaît. Beaucoup ne croient plus qu’il s’agisse d’une réalité voulue  par le  Seigneur Lui-même. Pour certains, elle n’est qu’une construction humaine, que nous pouvons par conséquent réorganiser à notre convenance.  C’est ainsi qu’en vue du prochain synode sur la famille, un certain cardinal propose que l’Eglise permette la célébration de l’union des adultères publics, et leur donne la Communion…  Si l’Église est notre Église, si l’Église n’est que nous, si ses structures et ses lois ne sont pas celles qu’a voulues le Christ, alors à quoi bon encore une hiérarchie qui garantisse la Foi et donne aux sacrements leur légitimité ?

Simon devient « Pierre, Rocher (Mt 16 18) ». De même que Dieu était le « Rocher » sur lequel Israël pouvait s’appuyer en toute confiance, le nouveau peuple de Dieu peut s’appuyer sur le Pape, rendu participant de la solidité du Christ par sa foi, « comme un piquet qu’on enfonce dans un sol ferme » ! Mais quelle disproportion entre ce que peut faire un homme et le pouvoir de résister aux puissances de l’Enfer (ibid) ! Cette disproportion montre bien que ce ne sont pas les hommes, si saints soient-ils, qui soutiennent l’Église, mais Dieu. N’est-ce pas ce qu’a voulu nous dire saint Jean-Paul II en assumant jusqu’au bout sa charge, quelque grabataire qu’il fût ? C’est ainsi que Dieu dirige l’Église trop souvent non pas grâce aux hommes d’Église, mais malgré eux… Avec le même réalisme en vertu duquel nous admettons aujourd’hui les péchés des papes, nous devons également reconnaître que Pierre a toujours été le roc contre les idéologies, contre la réduction de la Parole à ce qui est plausible à une époque déterminée, contre la soumission aux puissants de ce monde.

Bref, ce ne sont pas « la chair et le sang (Mt 16 17) » qui sauvent, mais c’est le Seigneur, par l’intermédiaire de ceux qu’Il a choisis.

« Qui a connu la pensée du Seigneur ? Qui a été Son conseiller ? Qui Lui a donné et mériterait de recevoir en retour ? Car tout est de Lui, et par Lui, et pour Lui. À Lui la gloire pour l’éternité ! Amen (Rm 11 34-36). »