Jean-Marie Mathieu

 Reviens, colombe !
Le cerf blessé
Paraît sur la colline.

Jean de la Croix, Le Cantique spirituel

       « Sire, bien soiez venuz, que molt vos avons désiré à veoir ! » Les gens du roi Arthur saluèrent ainsi Galaad [2], à son approche, comme le rapportent les Romans de la Table ronde, car tous savaient que ce jeune chevalier allait mettre fin aux temps aventureux du royaume de Logres en ayant le pouvoir de s’asseoir sur le siège périlleux et de contempler « apertement les merveilles du sainct Greal ». Trouvé alors seul terrien digne d’un tel exploit, Galaad devait avoir, comme l’homme célébré par le psalmiste, les mains innocentes et pur le cœur [3] ; non qu’il fût sans péché ni défaut – si nous disons : « nous n’avons pas péché » , nous faisons de Dieu un menteur – mais droit d’intention, franc de parler, chaste et surtout humble.

     Dans cette queste du précieux Graal, il supplanta son propre père, d’abord appelé Galaad mais vite surnommé l’ancelot, c’est-à-dire le petit serviteur. Ce Lancelot, qui était le fils unique du roi Ban de Bénoïc et de la reine Hélène, elle-même noble descendante de la lignée du roi David comme l’assure la légende, fut élevé en cachette par la mystérieuse Dame du Lac et fut surnommé dès lors Lancelot du Lac. Il se révéla fougueux combattant, large d’épaules, cheveux blonds comme blé d’été et yeux éclats d’émeraude, mais au blason dédoré, entaché à jamais par ses amours adultères avec la reine Guenièvre. Le roi Arthur, navré d’infortune, aurait pu murmurer du haut de sa plus haute tour, embrassant du regard la vaste forêt gaste éparse tout alentour :

    «  Ô saisons, ô châteaux ! Quelle âme est sans défauts ? »

     Nos ancêtres du Moyen Âge désiraient, aimaient beaucoup entendre merveilles ; il leur en fut contées par troubadours et trouvères friands de rêves, d’amour, de poésie. Et c’est ainsi que maintes histoires d’enchanteurs et de nains, de courtois chevaliers et de dames gentes, de fées et d’ermites ès sombres forêts, cette ronde de récits où le merveilleux le dispute au tragique, fascinèrent l’Europe entière qui y découvrit l’expression la plus juste et la plus belle de son âme secrète [4].  Et l’on se tromperait grandement en pensant que les auteurs médiévaux, un Chrestien de Troyes, un Robert Wace, un Robert de Boron, inventèrent de toutes pièces pareils romans ; mais s’ils les ‘inventèrent’ – et ‘merci’ leur en soit dit – ce fut donc qu’ils trouvèrent de quoi faire leur miel dans le millénaire fonds culturel celte, ce dernier transmettant probablement d’antiques légendes surgies, mais dans quel état ? des temps immémoriaux.

     L’Église a été bien inspirée qui n’a pas fait table rase des différentes civilisations, sagesses et traditions religieuses rencontrées au cours de sa mission évangélisatrice. Elle a gardé ce qu’après un tri sévère elle a cru bon d’intégrer à son architecture, à son art, à sa philosophie, à sa légende dorée. Qui dira ce dolmen antédiluvien (?) abrité sous l’aile bienveillante d’un des plus anciens lieux de culte marial d’Occident ; ce puits carré carnute caché sous la cathédrale emblématique ; ces vierges païennes ‘baptisées’ sur le giron de l’Alma Mater et devant enfanter pour qui ? pour quoi ? ; toutes ces croix disséminées dans quasi tous les peuples qui se voient sous les cieux, en Europe blanche, en Afrique noire,  aux Amériques rouges, en Asie jaune ? Expliquer que ces deux traits croisés à angle droit ne sont que le banal symbole géographique des quatre points cardinaux serait se montrer encore plus naïf que Perceval le Gallois surnommé justement le Nice !

         Le grand saint Augustin d’Hippone, en ses vieux jours, en vint à se convaincre que ce que l’on « appelle maintenant ‘Religion chrétienne’ existait chez les Anciens »[5]. Le péché originel de nos premiers parents et les perversions de leurs descendants, pensées malhonnêtes, meurtres, anthropophagie, adultères, idolâtrie, polythéisme, débauches, vols, faux témoignages, diffamations, bref tous les mauvais desseins qui se peuvent sortir d’un cœur de pierre, ont certainement assombri la Révélation primitive, mais cette dernière n’en fait pas moins partie de l’étonnant Plan divin. À Adam et Ève, ayant mangé de l’Arbre défendu, Dieu en effet avait promis un Rédempteur, fait espérer un Salut. Cette première annonce du Messie sauveur consignée dans le Livre de la Genèse [6], celle d’un combat entre le serpent et la Femme, celle de la victoire finale d’un descendant de celle-ci, a été qualifiée de ‘Protévangile’ par les Pères de l’Église. Avec Noé, Dieu conclut ensuite une Alliance couleur arc-en-ciel qui restera toujours en vigueur parmi tous les peuples de la terre aussi longtemps que l’Évangile de Jésus-Christ ne leur sera pas annoncé. Le prophète Ézéchiel, qui appartenait au peuple israélite vivant selon la Loi transmise par Moïse de lignée abrahamique, présente d’ailleurs Noé, Danéèl et Job comme des justes au sein de nations païennes [7].

     Mais puisque vient d’apparaître sous ma plume le nom de Job, sait-on assez que ce vieillard recru d’épreuves, que la Tradition juive situe à l’époque du patriarche Abraham, fut celui qui s’écria : « Qui fera donc que Dieu m’écoute ? Voici ma signature ! Que le Tout-Puissant me réponde ! Le libelle qu’aura écrit mon adversaire, je veux le porter sur mon épaule, le ceindre comme une couronne sur mon front ! »[8] Lisant trop vite, on n’aura pas pris garde que le mot français ‘signature’ veut traduire l’hébreu thav תו , Th W, qui désigne l’ultime lettre de l’alephbeth hébreu ת, en fait elle-même originée dans une ‘marque’ en forme de croix : + , dernier tracé des vingt-deux signes lettriques mis au point et utilisés jadis par les Phéniciens. La signature de Job ressemble à une ‘marque’ en forme de croix, c’est son dernier ‘mot’ en quelque sorte.

     Voici qu’Ézéchiel réapparaît, en témoin fidèle ayant entendu ce que le Dieu d’Israël ordonna et dit à un ange du ciel : « Parcours la ville, parcours Jérusalem et trace unthav, une marque en forme de croix sur le front des hommes qui gémissent et qui pleurent sur toutes les pratiques abominables qui se commettent au milieu d’elle. »[9] Échapperont à la mort uniquement ceux et celles qui portent la marque croisée sur leur front ; tous les autres seront exterminés par les anges de Dieu…

     Le dernier Livre du Nouveau Testament, à son tour, fera allusion par deux fois à cette croix, comme pour nous signifier que c’est bien là l’ultime ‘signature’, l’ultime ‘mot’ célestiel à ne surtout pas ignorer. Quand saint Jean vit un « Ange monter de l’Orient, portant le sceau du Dieu vivant », il l’entendit crier « d’une voix puissante aux quatre anges auxquels il fut donné de malmener la terre et la mer : ‘Attendez, pour malmener la terre et la mer et les arbres, que nous ayons marqués au front les serviteurs de notre Dieu ‘ ». Puis, l’Apôtre aperçut des sauterelles qui reçurent un pouvoir pareil à celui des scorpions de la terre. « On leur recommanda d’épargner les prairies, toute verdure et tout arbre, et de s’en prendre seulement aux hommes qui ne porteraient pas sur le front la marque de Dieu. » [10]

     Faut-il s’étonner qu’un païen de droite vie : Job, qu’un israélite prophète de Y H W H : Ézéchiel, et que le disciple aimé de Jésus se retrouvent tous les trois autour de cette marque symbolique, peut-être déjà suggérée par le mystérieux ‘signe’, en hébreu ῾ôth, אות ,  hA W Th, mis par la miséricorde divine sur Caïn, « afin que le premier venu ne le frappât point », lui le meurtrier de son frère cadet ? Ce ‘signe’ d’origine miraculeuse fut-il tracé par un ange sur le front de Caïn, voire placé au-dessus de sa tête ? L’auteur sacré ne le précise pas, à dessein.

     Lorsque saint Jean écrit dans son évangile qu’avant de mourir sur la croix Jésus, son divin Maître, dit : « Tout est accompli ! », il donne à entendre que ce sont les Écritures qui viennent d’être pleinement accomplies. L’arbre dressé sur le Calvaire apparaît telle la signature, l’ultime lettre, le dernier mot du Logos venu souffrir en notre chair pour nous sauver. Et depuis la Résurrection au matin de Pâques, les chrétiens prirent l’habitude de tracer sur leur front une croix à l’aide du pouce  de la main droite, rappelant ainsi le signe, la marque de leur Salut. Au cours du VIIIͤ  ͤsiècle, ce signe de croix fut étendu au corps tout entier, accompagnant la formule trinitaire : « Au Nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit. » C’était retrouver, sans trop l’expliciter, ce que la Tradition juive affirmait à propos de la lettre hébraïque thav dans sa forme archaïque phénicienne + : la croix servait jadis, en effet, à manifester le Tétragramme  Y H W H, en hébreu   יהוה  signifiant ‘Il est’, Nom propre de Dieu révélé au sein du Buisson ardent à Moïse. On doit à Liliane Vezin une magnifique synthèse des dernières découvertes sur la signification de ce symbolisme capital à plus d’un titre [11]. À force de la répéter, l’information finira bien par trans-passer le mur du… silence !

        Inscrivons donc le schéma du Nom divin suivant la croisée traditionnelle :

 י
Y
croix
ה    H  clou                 Sh  ש                   clou   H   ה
plaie du cœur
W
clouו

     Tout baptisé peut ainsi manifester sa foi au Dieu Un et Trine, qui a pour Nom  propre Y H W H. Pour ce faire, il se signe d’abord sur le front, en haut du corps « Au Nom du Père », ensuite sur le nombril « et du Fils » qui s’est incarné en Marie la Vierge sainte de Nazareth, enfin sur les deux épaules « et du Saint-Esprit », ce qui permet de donner ces équivalences :

                                        Y : yod      י    = lettre symbolisant le Père

                                         H : hé       ה    = lettre symbolisant l’Esprit du Père

                                         W: wav     ו    = lettre symbolisant le Fils

                                         H : hé       ה    = lettre symbolisant l’Esprit du Fils

      Les deux HH spirituels ne veulent pas indiquer qu’existeraient deux ‘esprits’ bien sûr, mais nous invitent à mettre en relief cette affirmation du Credo catholique : l’Esprit Saint, troisième Personne de la Trinité, « procède du Père et du Fils » c’est-à-dire, pour être plus précis en reprenant la formule de saint Bonaventure docteur de l’Église : « l’Esprit procède principalement et immédiatement du Père [Y], Principe sans principe, et médiatement du Fils [W]. [12]

     Il a suffi de méditer sur la formule de Jean Scot, ce laïc irlandais du IXème siècle professeur à la cour de France, énonçant que Dieu est « forma omnium summa », c’est-à-dire « forme suprême de toutes choses » – formule reprise dans l’enseignement de l’école de Chartres fondée par saint Fulbert au XIͤ siècle  –  pour réaliser subitement que le Christ mort en croix, bras étendus, donne à voir à tous les hommes, en sa chair meurtrie, combien le corps matériel lui-même est le symbole de l’immatériel invisible. « Alors vous saurez que Je Suis ! » [13]  Oui, c’est bien Lui, ‘Il est’, qui siège sur le trône de gloire ! Origine et terme communs de toute perfection au ciel ainsi que sur la terre. En vérité, en vérité, le Buisson ardent, c’est la Croix.

      En prenant chair de la Vierge Marie, « le plus beau des enfants des hommes » a désiré entraîner l’humanité à sa suite, afin que nous parvenions tous, un jour, « à l’état d’Homme parfait, à la plénitude de la stature du Christ » [14]. C’est le désir du Cœur de Dieu. Un théologien du Moyen Âge eut un jour l’idée géniale de comprendre l’In-carna-tion comme une in-corda-tio Dei. Affirmer que Dieu s’est fait chair revient  à dire que Dieu s’est fait cœur, cor-cordis en latin. Le cœur humain d’ailleurs, remarquons-le, est divisé en quatre parties disposées en croix : deux oreillettes surmontant deux ventricules ; la langue française des oiseaux, ici, semble vouloir nous signifier que nous devons écouter la Parole de Dieu et la mettre en pratique afin que ‘naisse’ en nous abondance de fruits.

     Au cours de sa Passion, Jésus de Nazareth, après  avoir été flagellé, fut couronné d’épines et ce fut avec ce royal casque dérisoire et terrible qu’il monta vers le Golgotha où il se laissa dépouiller de ses vêtements, de sa tunique pourpre sans couture, avant d’être fixé au bois par trois clous, un dans chaque main et un seul en travers des pieds. Il mourut avant les deux brigands crucifiés en même temps que lui, ce que voyant, l’un des soldats, de sa lance, lui perça le côté. Un tel coup de lancearomaine asséné post mortem a dû laisser sur le flanc droit une plaie ouverte, béante, comme offerte [15]. Le bouclier de Jésus, c’est son cœur humble et doux qui prend les coups au tournoi à notre place, misérables pécheurs que nous sommes… Vaillant fils du roi David, voilà votre blason entaillé, transpercé, on voit la jour à travers ! N’y aurait-il pas là un de ces mystères que votre amour se plaît à déchiffrer ?

      Sainte Catherine de Sienne, religieuse italienne du XIVème siècle, s’enhardit à poser cette question au Seigneur durant une vision : « Hélas, doux Agneau sans tache, tu étais mort quand ton côté fut ouvert, pourquoi donc as-tu voulu que ton cœur fût frappé et brisé ? » Jésus lui répondit : « J’avais plusieurs raisons, mais je vais te dire la principale. C’est que mon désir du genre humain était infini, alors que les tourments et souffrances que j’endurais étaient finis. Aussi n’est-ce point avec ce qui était fini que je pouvais montrer tout l’amour que j’avais pour vous, puisque mon amour était infini. Je voulus donc, en vous montrant mon côté ouvert, que vous voyiez le secret du cœur, afin que vous voyiez que j’aimais beaucoup plus que je ne pouvais le montrer avec ma souffrance finie. » [16]

     Précisément trois siècles plus tard, ce fut le secret de ce cœur divin, de son Sacré-Cœur, que Jésus le ‘Désiré des collines éternelles’ vint révéler lors de ses apparitions à Paray-le-Monial. Voulant représenter ce qu’elle avait eu le privilège de contempler, sainte Marguerite-Marie, un jour de juillet de l’an 1685, traça de sa main – ou fit réaliser par une jeune novice, on ne sait au juste – ce « petit image de papier crayonné avec une plume » riche de signification [17] :

      L’inscription, tout autour, des noms des parents de la Vierge, Joachim et Anne, ainsi que de ceux de la Sainte Famille, Joseph, Marie et Jésus, veut simplement souligner le réalisme de l’Incarnation : le Fils de Dieu s’est réellement inséré dans une lignée familiale appartenant à la grande communauté humaine.

     La couronne d’épines stylisée, curieusement torsadée comme un tortil de chevalier, encercle d’éternité le cœur ardent et n’est pas sans rappeler le Buisson d’où jaillit la révélation du Nom divin  Y H W H.

     Le cœur est schématisé en forme de vase, vu en coupe, d’où émerge une croix entourée de flammes. Il contient les trois clous qui fixèrent Jésus au bois, disposés de façon à pouvoir encadrer la plaie centrale, celle du coup de lance : deux en haut, à droite et à gauche, et un en bas dans l’axe médian. Enfin, la plaie du cœur elle-même, centrale, horizontale, esquisse une bouche d’où s’écoulent gouttes de sang vermeil et perles d’eau immaculée – grâces et bénédictions sont répandues sur ces lèvres ! – , bouche qui ne pourrait proférer qu’un unique et seul mot, écrit étonnamment avec huit lettres : « CHARITAS » , éternellement.

 Quelqu’un demanda au Bien-aimé :

Qui es-tu ? Il répondit – Charitas.

Et qui t’a engendré ? –  Charitas.

D’où viens-tu ? –  De Charitas

Où vas-tu ?   – À Charitas

À Charitas, de Charitas ?

 –  De Charitas à Charitas

Qu’offres-tu ? – Charitas.

Et qu’annonces-tu ? – Charitas !

     Le cœur de Jésus crucifié constitue en réalité le centre symbolique de la croix. La plaie apparente qu’y provoqua l’arme du centurion romain nous permet de « voir la blessure invisible de l’Amour » ainsi que se plaisait à le dire saint Bonaventure. Cœur percé au centre de tous les centres, foyer solaire mystérieux, caverne du Lion où viennent se réfugier tous les mystiques. Elle restera pour toujours béante cette empreinte qui marque à jamais la chair et l’âme glorifiées du Ressuscité, et d’où se déversent sur nous à foison la divine Miséricorde et les sept dons du Saint-Esprit.

     Le Nom  Y H W H  ne devrait-il pas être apposé comme le sceau invisible du Dieu vivant sur cette image à la symbolique quasi directement inspirée du Ciel, image devenue au cours de l’histoire de l’Église le trésor le plus précieux des pauvres et des humbles ?   Essayons :

Y   :    י       =   Père : la croix surmonte le cœur, comme le signe tracé sur le front des baptisés ;

H    :    ה     =  Esprit du Père : clou de la main droite ;

Sh  :   ש      =   plaie du cœur post mortem ;

W   :    ו      =   Fils : clou qui fixa les deux pieds, le gauche posé sur le droit ;

H    :   ה      =   Esprit du Fils : clou de la main gauche. [18]

     Au centre de la croix apparaît désormais la vingt-et-unième lettre hébraïque, leshin,   ש  , Sh, symbolisant la nature humaine que le Verbe a revêtue en prenant chair de la Vierge de Nazareth.

     Le cœur représente à lui seul la quintessence du corps humain, de la chair, de la personne humaine. Si bien que la splendide expression de Tertullien « la chair est le pivot du salut » pourrait peut-être désormais se formuler ainsi : « caro cordis salutis cardo », « la chair du cœur, du salut le pivot ». Le prêtre de rite grec (orthodoxe ou uniate) lors de la sainte Liturgie eucharistique, se sert d’un couteau spécial, appelé « sainte lance » justement, pour découper le pain non consacré sur l’autel. Tandis qu’à Lanciano en Italie au VIIIè siècle, l’Hostie consacrée se transforma miraculeusement, sous les yeux d’un moine incrédule, en un anneau de chair vivante constituée du tissu musculaire du myocarde !

     En inscrivant le shin au cœur du Tétragramme, on obtient le Nom de gloire du Seigneur, le ‘Nom nouveau’ de Jésus ressuscité, au corps, au cœur et à l’âme désormais glorifiés dans le cieux [19] : Y H Sh W H,   יהשוה  ,  Clef de la gnose, de lagnôsis véritable.

     Les exégètes ont remarqué que le verset 26 du Psaume 118 revenait deux fois à la fin de l’évangile de saint Matthieu. Lors de l’entrée triomphale du fils de David à Jérusalem, au jour des Rameaux, toute la foule se mit à crier : « Béni soit celui qui vient au Nom du Seigneur ! » À quelque temps de là, Jésus apostrophant les élites juives par Jérusalem interposée, déclara : « Je vous le dis, vous ne me verrez plus désormais, jusqu’à ce que vous disiez : ‘Béni soit celui qui vient au Nom du Seigneur! ‘ » La formule « au Nom du Seigneur » traduit l’expression hébraïquebéshèm Y H W H,  בשם  יהוה où la préposition bé, ב peut signifier ‘avec, par, dans’. Maintenant que nous connaissons le Nom de gloire, il nous est possible de comprendre, ce qui donne un relief saisissant à la Parole de Dieu : « Béni soit celui qui vient dans le Nom du Seigneur ! » Béni soit celui qui apparaît sur la colline, tel un cerf blessé entouré de lions, montrant son charnel Cœur divin nommé de gloire qui veut régner par amour dans tous les cœurs.

          Messire  Y H Sh W H, bien soiez béni que molt désirons à veoir !

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Notes :

[1] Mosaïque du Cerf blanc et des lions rouges réalisée par Jean Delpech pour l’église de Tréhorenteuc, nom breton qui signifie ”pays de la charité” ; cette église, restaurée entre 1942 et 1953 par le recteur, l’abbé Gillard, se dresse à l’orée de la légendaire forêt de Brocéliande, près du magnifique, mythique  Val sans retour.

[2] Galaad est un nom qui n’est pas sans rappeler ( volontairement ? ) le biblique גלעד; cf.Gn 31, 47 : nom hébreu signifiant ‘monceau du témoignage’ donné à un cairn par le patriarche Jacob…

[3] Ps 24, 3-4 : «  Qui montera sur la montagne de Y H W H … ? »

[4] Cf. Les Romans de la Table ronde, Préface de Joseph Bédier, Paris, le Club du Livre, 1952 : on y appréciera l’élégance du style de Jacques Boulenger qui a vraiment réussi à « renouveler » ce chef-d’œuvre médiéval. Gallimard vient d’éditer en trois volumes le Livre du Graal dans la Bibliothèque de la Pléiade.

[5] Retractationes, I, 13, 3.

[6] Gn 3, 15.

[7] Éz 14, 14 ; ce Danéèl :  דנאל  n’est pas le prophète Daniel :  דניאל , mais le héros d’un poème phénicien antique dont on a découvert l’existence à Ugarit ( Ras-Shamra).

[8] Jb 31, 35-36.

[9] Éz 9, 4-6.  Le Zohar croit dur comme fer que les habitants de Jérusalem marqués du thav sur le front étaient condamnés à mort. Interrogé là-dessus, Charles Mopsik, spécialiste de la Kabbale juive aujourd’hui disparu, ne daigna jamais répondre.

[10] Ap 7, 2-3 et 9, 4.

[11] Beauté du Christ dans l’art, Paris, Mame, 1997, p. 24.

[12] In I Sent. d. 12 a 1, q. 2 concl. I, 222 a.

[13] Jn 8, 28 ; cf. Le Nom de gloire, essai sur la Qabale, Méolans-Revel, Éd. DésIris, 1992, p. 26 où je propose un commentaire des quatre « Je Suis » abolus de l’évangile johannique : Jn 8, 24 et 58 ; 13, 19.

[14] Cf. Ép 4, 13.

[15] Ce que confirment les analyses exécutées sur le Linceul de Turin : cf. Clercq, Jean-Maurice, Les grandes reliques du Christ, Paris, Éd. F.-X. de Guibert, 2007, p. 95 : « La forme béante de la plaie (…), entre les cinquième et sixième côtes, indique que le coup a été porté sur un homme déjà mort (…). Le fait qu’il s’est écoulé par cette plaie du liquide incolore qui ne s’est pas mélangé au sang confirme que le coup a été porté jusqu’au cœur : l’anatomie précise que ce sang provenait du ventricule droit et que le liquide incolore provenait du péricarde, membrane qui entoure le cœur. »

[16]  Dialogue, Traité sur la prière, chap. 75, § 3 et 4. Cette tertiaire dominicaine ( 1347-1380 ) est l’ une des trois femmes docteurs de l’Église, avec saintes Thérèse d’Avila et  Thérèse de l’Enfant-Jésus.

[17] Cf. Vie et œuvres de sainte Marguerite-Marie, Présentation du P. Raymond Darricau, Paris, Éd. Saint-Paul, 1990, t. 1er, p. 124.

[18] Cf. mes deux articles : La Prière signée du Nom et Le carré SATOR, le Pater Noster et la croix, parus dans la revue du Cep n° 40, 2007 et n° 44, 2008 (le-cep.org ), mis en ligne sur le site de Contrelittérature, les 25 septembre et 5 novembre 2008.

[19] La différence entre le nom de Josué-Jésus,  Yéshou’a   ישוע , et le Pentagramme ( = cinq grammes ou lettres ) Y H Sh W H  יהשוה , est expliquée en mon Nom de gloire,op. cit., pp. 29-38.  N’oublions pas que « c’est pour avoir nommé Jésus Seigneur, « Kurios », en somme pour avoir ‘prononcé le Nom’, qu’Étienne ( Ac 7, 58 ) est lapidé, en vertu de la prescription de Lv 24, 16-23 » précise La Bible d’Alexandrie, Lévitique,Paris, le Cerf, 1988, t. 3, p. 196.

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