A handout picture released by the Vatican press office show Pope Francis (C) chairing an extraordinary synod of nearly 200 senior clerics in the Synod Aula at the Vatican on October 6, 2014. Pope Francis issued a strong signal of support for reform of the Catholic Church's approach to marriage, cohabitation and divorce as bishops gathered for a landmark review of teaching on the family. Thorny theological questions such as whether divorced and remarried believers should be able to receive communion will dominate two weeks of closed-door discussions set to pit conservative clerics against reformists. AFP PHOTO / OSSERVATORE ROMANO == RESTRICTED TO EDITORIAL USE - MANDATORY CREDIT "AFP PHOTO / OSSERVATORE ROMANO" - NO MARKETING NO ADVERTISING CAMPAIGNS - DISTRIBUTED AS A SERVICE TO CLIENTS ==

Son Excellence Mgr Athanasius Schneider nous donne sa réaction concernant le Rapport Final du Synode. Lui aussi voit comme des « moyens détournés » (anglais : « une porte arrière ») les articles portant sur les divorcés/remariés, articles qui favoriseront la Sainte Communion pour les adultères, un rejet de l’enseignement du Christ et un Rapport Final plein de « bombes à retardement ».

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Pour votre convenance, comme toute l’analyse de Mgr Schneider porte exclusivement sur les trois numéros (# 84, # 85 et # 86) du Rapport Final du Synode 2015 touchant les divorcés remariés, nous les avons reproduits in extenso en bas de page. Nous nous permettons également de signaler en rouge les parties les plus marquantes.

Des moyens détournés pour des pratiques néo-mosaïques (note : rappelons ici que Moïse avait donné le droit au mari de répudier sa femme pourvu qu’une lettre de répudiation lui soit remise) dans le Rapport Final du Synode

L’Assemblée XIV général du Synode des Évêques (4-25 Octobre, 2015), qui a été consacrée au thème de « La vocation et la mission de l’Église et de la famille dans le monde contemporain » a publié un Rapport Final avec des propositions pastorales qui sont soumises maintenant au discernement exclusif du Pape. Le document lui-même est seulement de nature consultative et ne possède pas une valeur magistérielle formelle.

Pourtant, au cours du Synode, il semble que ces nouveaux disciples réels de Moïse et ces nouveaux Pharisiens qui, dans les numéros 84-86 du Rapport Final, ont ouvert une porte arrière ou des bombes à retardement imminentes pour l’admission des divorcés remariés à la Sainte Communion. Dans le même temps les Évêques qui ont intrépidement défendu « la fidélité propre de l’Église au Christ et à Sa Vérité » (Jean-Paul II, Exhortation Apostolique Familiaris Consortio, 84) étaient injustement étiquetés comme étant des Pharisiens dans certains reportages des médias.

Les nouveaux disciples de Moïse et les nouveaux Pharisiens au cours des deux dernières Assemblées du Synode (2014 et 2015) ont masqué de façon pratique leur déni de l’indissolubilité du mariage et ont amené une suspension du Sixième Commandement au cas par cas sous le couvert de la notion de la miséricorde en utilisant des expressions telles que : « voie du discernement », « accompagnement », « orientations de l’Évêque », « dialogue avec le prêtre », « for interne », « grâce à une plus grande et entière intégration dans la vie de l’Église » ; ils ont amené une éventuelle suppression de l’imputabilité en ce qui concerne la cohabitation dans les unions irrégulières (cf. Rapport Final, nos. 84-86). 
Cardinal-Kasper

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(Cardinaux Kasper, Marx, Mgr Bonny (évêque d’Anvers)

Mgr-Jozef-De-Kesel

et Mgr Jozef De Kesel (archevêque de Malines-Bruxelles).

Cette section de texte dans le Rapport Final contient en effet une trace d’une pratique néo-mosaïque du divorce même si les rédacteurs ont habilement et d’une manière rusée évité toute modification directe de la Doctrine de l’Église. Par conséquent, toutes les parties, à la fois les promoteurs du soi-disant « Agenda Kasper » et leurs adversaires sont apparemment satisfaits en déclarant : « Tout est OK. Le Synode n’a pas changé la Doctrine ». Pourtant, une telle perception est assez naïve car elle ignore la porte arrière et les bombes à retardement en attente dans la section de texte susvisé qui deviennent manifestes par un examen attentif du texte selon ses critères d’interprétation interne.

Même quand on parle d’une « voie de discernement », on parle de « repentance » (Rapport Final, n. 85), il reste néanmoins beaucoup d’ambiguïté. En fait, selon les affirmations réitérées du Cardinal Kasper et des Ecclésiastiques aux vues similaires, une telle repentance est en relation avec les péchés passés envers le conjoint du premier mariage valide et le repentir du divorcé ne peut même pas se référer aux actes de leur cohabitation conjugale avec le nouveau partenaire marié civilement.

L’assurance dans le texte aux numéros 85 et 86 du Rapport Final qu’un tel discernement doit être fait selon l’enseignement de l’Église et dans un jugement correct reste néanmoins ambiguë. En effet, le Cardinal Kasper et les Ecclésiastiques aux vues similaires ont assuré à plusieurs reprises et avec insistance que l’admission des divorcés et remariés civilement à la Sainte Communion ne touchera pas le Dogme de l’indissolubilité du mariage et de la Sacramentalité du Mariage et qu’un jugement en leur conscience dans ce cas doit être considéré comme étant correct même lorsque les divorcés remariés continuent à cohabiter d’une manière matrimoniale et qu’ils ne devraient pas être tenus de vivre en complète continence en tant que frère et sœur.

En citant le célèbre numéro 84 de l’Exhortation Apostolique Familiaris Consortio du Pape Jean Paul II dans le numéro 85 du Rapport Final, les rédacteurs ont censuré le texte en coupant (i.e. évitant de rapporter) la formulation décisive suivante de celui-ci : « La façon à qui l’Eucharistie peut seulement être accordée sont ceux qui prennent l’engagement de vivre en complète continence, c’est-à-dire en s’abstenant des actes réservés aux époux ».

Cette pratique de l’Église est fondée sur la Révélation Divine de la Parole de Dieu : écrite et transmise par la Tradition. Cette pratique de l’Église est l’expression de la Tradition ininterrompue depuis les Apôtres et, par conséquent, reste immuable pour tous les temps. Déjà Saint Augustin affirmait : « Qui renvoie sa femme adultère et épouse une autre femme alors que sa première femme vit toujours, demeure perpétuellement dans l’état d’adultère. Un tel homme ne peut pas bénéficier de pénitence efficace tant qu’il refuse d’abandonner la nouvelle épouse. S’il est un catéchumène, il ne peut être admis au baptême parce que sa volonté reste ancrée dans le mal. S’il est un (baptisé) pénitent, il ne peut pas recevoir la réconciliation (ecclésiastique) tant qu’il ne rompt pas avec sa mauvaise attitude » (De de les coniugiis, 2, 16). En fait, la censure ou l’omission intentionnelle ci-dessus de l’enseignement dans Familaris Consortio au numéro 85 du Rapport Final représente pour tout herméneute sain la clé de l’interprétation et de la compréhension de la section de texte sur les divorcés remariés (numéros 84-86).

De nos jours, il existe une pression idéologique permanente et omniprésente de la part des médias qui sont conformes à la pensée unique, imposée par les pouvoirs anti-chrétiens mondiaux avec l’objectif d’abolir la Vérité sur l’indissolubilité du mariage — banalisant le caractère sacré de cette Divine Institution par la diffusion d’une anti-culture de divorce et de concubinage. Déjà il y a 50 ans, le Concile Vatican II a déclaré que les temps modernes sont infectés par le fléau du divorce (cf. Gaudium et Spes, 47). Le même Concile avertit que le mariage chrétien comme Sacrement du Christ ne devrait « jamais être profané par l’adultère ou le divorce » (Gaudium et Spes, 49).

La profanation du « Grand Sacrement » (Ep 5, 32) du mariage par le divorce et l’adultère a pris des proportions massives et ce, à un rythme alarmant non seulement dans la société civile mais aussi parmi les Catholiques. Lorsque les Catholiques au moyen du divorce et de l’adultère répudient théoriquement ainsi que pratiquement la Volonté de Dieu exprimée dans le Sixième Commandement, ils se mettent en danger spirituellement grave de perdre leur salut éternel. 

L’acte le plus miséricordieux au nom des Pasteurs de l’Église serait d’attirer l’attention sur ce danger au moyen d’une claire — et dans le même temps aimante — exhortation au sujet de l’acceptation nécessairement complète du Sixième Commandement de Dieu. Ils doivent appeler les choses par leur vrai nom en exhortant le fait que : « le divorce est le divorce », « l’adultère est l’adultère » et « qui commet consciemment et librement des péchés graves contre les Commandements de Dieu — et dans ce cas contre le Sixième Commandement — meurt impénitent et recevra une condamnation éternelle étant exclus à jamais du Royaume de Dieu ».

Une telle mise en garde et exhortation sont le travail même de l’Esprit Saint comme le Christ a enseigné : « Et il prouvera aux gens de ce monde leur erreur au sujet du péché, de la Justice et du Jugement de Dieu » (Jean 16 : 8). En expliquant l’œuvre de l’Esprit Saint pour « convaincre du péché », le Pape Jean-Paul II a dit : « Chaque péché commis n’importe quand ou n’importe où est en référence à la Croix du Christ — et donc aussi indirectement à ceux qui « n’ont pas cru en Lui » et qui ont condamné Jésus-Christ à la mort sur la Croix » (encyclique Dominum et vivificantem, 29). Ceux qui mènent une vie conjugale avec un partenaire qui n’est pas leur conjoint légitime, comme c’est le cas avec les divorcés remariés civilement, rejettent la Volonté de Dieu. Convaincre ces personnes concernant ce péché est un travail mû par l’Esprit Saint et commandé par Jésus-Christ et donc une oeuvre éminemment pastorale et miséricordieuse.

Le Rapport Final du Synode omet malheureusement de convaincre les divorcés remariés concernant leur péché concret. Au contraire, sous le prétexte de la miséricorde et d’une fausse pastorale, les Pères Synodaux qui ont soutenu les formulations dans les numéros 84-86 du Rapport ont tenté de dissimuler l’état spirituellement dangereux des divorcés remariés.

De fait, ils leur disent que leur péché d’adultère n’est pas un péché et que ce n’est certainement pas de l’adultère ou que, tout au moins, ce n’est pas un péché grave et qu’il n’y a pas de danger spirituel dans leur état de vie. Un tel comportement de ces Pasteurs est directement contraire à l’œuvre de l’Esprit Saint et est donc anti-pastoral et un travail des faux prophètes à qui on pourrait appliquer les paroles suivantes de l’Écriture Sainte : «Quel malheur de voir ces gens qui déclarent bien ce qui est mal, et mal ce qui est bien ! Ils prétendent clair ce qui est sombre, et sombre ce qui est clair. De ce qui est doux ils font quelque chose d’amer, et de ce qui est amer quelque chose de doux ». (Esaïe 05 :20) et : « Tes prophètes n’ont eu pour toi que des messages mensongers et creux. Ils n’ont pas démasqué ta faute, ce qui aurait conduit à ton rétablissement. Leur message pour toi n’était que mensonge et poudre aux yeux » (Lam 2 : 14). Pour ces Évêques sans aucun doute l’Apôtre Paul dirait aujourd’hui ces paroles : « Ces gens-là ne sont que de faux apôtres, des tricheurs qui se déguisent en apôtres du Christ ». (2 Co 11 :13).

Le texte du Rapport Final du Synode omet non seulement de convaincre sans ambiguïté les personnes divorcées remariées civilement concernant l’adultère mais aussi le caractère gravement peccamineux de leur style de vie. Il justifie indirectement un tel mode de vie en reportant cette question en fin de compte au domaine de la conscience individuelle et en faisant une mauvaise application du principe moral de l’imputabilité au cas de cohabitation des divorcés remariés. Le fait d’appliquer le principe de l’imputabilité à une vie stable, permanente et publique dans l’adultère est incorrect et trompeur.

La diminution de la responsabilité subjective est donnée seulement dans le cas où les partenaires ont la ferme intention de vivre dans la continence complète et qu’ils font des efforts sincères à ce faire. Tant que les partenaires continuent à persister intentionnellement dans leur vie pécheresse, il ne peut y avoir aucune suspension de l’imputabilité. Le Rapport Final donne l’impression que de suggérer qu’un style de vie publique dans l’adultère — comme c’est le cas des remariés civilement -—ne viole pas le lien indissoluble d’un mariage sacramentel ou qu’il ne représente pas un péché mortel ou grave et que cette question est en outre une question de conscience privée. Par la présente, on peut parler d’une dérive plus proche vers le principe protestant du jugement subjectif sur les questions de la foi, de la discipline et de la proximité intellectuelle en relation avec la théorie erronée de l’« option fondamentale », une théorie déjà condamnée par le Magistère (cf. Jean-Paul II, Encyclique Veritatis Splendor, 65-70).

Les Bergers de l’Église ne devraient pas d’aucune manière promouvoir une culture de divorce parmi les Fidèles. Même la plus petite allusion de céder à la pratique ou à la culture du divorce devrait être évitée. L’Église dans son ensemble devrait donner un témoignage convaincant et fort en faveur de l’indissolubilité du mariage. Le Pape Jean-Paul II a dit que le divorce « est un mal, comme les autres, qui affecte de plus en plus de Catholiques aussi, que le problème doit être confronté avec détermination et sans délai ». (Familiaris consortio, 84)

L’Église doit aider les divorcés remariés avec amour et patience à reconnaître leur propre péché, à les aider à se convertir de tout leur cœur à Dieu et à obéir à sa Sainte Volonté qui est exprimée dans le Sixième Commandement. Tant qu’ils continuent de donner un anti-témoignage public de l’indissolubilité du mariage et qu’ils contribuent à une culture de divorce, les divorcés remariés ne peuvent pas exercer des ministères liturgiques, catéchétiques et institutionnels dans l’Église qui demandent de par leur propre nature une vie publique en conformité avec les Commandements de Dieu.

Il est évident que les contrevenants publics par exemple des Cinquième et Septième Commandements tels que les propriétaires d’une clinique d’avortement ou des collaborateurs dans un réseau de corruption, non seulement ne peuvent-ils pas recevoir la Sainte Communion mais, évidemment, ils ne peuvent pas être admis aux services liturgiques et catéchétiques publics. De manière analogue, les contrevenants publics du Sixième Commandement, comme les divorcés remariés, ne peuvent pas être admis aux rôles de lecteurs, de parrains ou de catéchistes. Bien sûr, il faut distinguer la gravité du mal causé par le style de vie des promoteurs publics de l’avortement et de la corruption par rapport à la vie adultère de personnes divorcées. On ne peut pas les mettre sur le même pied. Le plaidoyer en faveur de l’admission des divorcés remariés à la tâche de parrains, marraines et catéchistes ne vise finalement pas le vrai bien spirituel de ces enfants, mais se révèle être une instrumentalisation d’un programme idéologique spécifique. C’est une malhonnêteté et une moquerie de l’institution des parrains ou des catéchistes qui, par l’intermédiaire d’une promesse publique, ont pris la tâche d’éducateurs de la foi.

Dans le cas des parrains ou des catéchistes qui sont divorcés remariés, leur vie contredit continuellement leurs paroles et, donc, ils doivent faire face à l’exhortation du Saint-Esprit, par la bouche de l’Apôtre Saint Jacques : « Ne vous faites pas des illusions sur vous-mêmes en vous contentant d’écouter la Parole de Dieu ; mettez-la réellement en pratique ». (Jacques 1 : 22). Malheureusement, le numéro 84 du Rapport Final plaide pour une admission des divorcés remariés aux offices liturgiques, pastoraux et éducatifs. Cette proposition représente une aide indirecte à la culture du divorce et un déni pratique d’un mode de vie objectivement pécheur. Le Pape Jean-Paul II au contraire a indiqué seulement les possibilités suivantes de participer à la vie de l’Église qui visent une vraie conversion de leur part : « On les invitera à écouter la Parole de Dieu, à assister au Sacrifice de la Messe, à persévérer dans la prière, à apporter leur contribution aux oeuvres de charité et aux initiatives de la communauté en faveur de la justice, à élever leurs enfants dans la foi chrétienne, à cultiver l’esprit de pénitence et à en accomplir les actes, afin d’implorer, jour après jour, la grâce de Dieu » (Familiaris consortio, 84).

Il devrait rester un domaine salutaire d’exclusion (non-admission aux Sacrements et aux rôles publics catéchétiques et liturgiques) afin de rappeler aux divorcés remariés leur état spirituel véritablement grave et dangereux et, en même temps, promouvoir dans leurs âmes une attitude d’humilité, d’obéissance et un désir pour une conversion authentique. L’humilité signifie le courage de la Vérité et seulement ceux qui se soumettent humblement à Dieu recevront Ses grâces.

Les fidèles, qui ne se sentent pas prêts et qui n’ont pas encore la volonté d’arrêter leur vie adultère, devraient être spirituellement aidés. Leur état spirituel est semblable à une sorte de « catéchuménat » en ce qui concerne le Sacrement de la Pénitence. Ils peuvent recevoir le Sacrement de la Pénitence, qui a été appelée dans la Tradition de l’Église « le second baptême » ou « la seconde pénitence », seulement s’ils rompent sincèrement avec l’habitude de la cohabitation adultère et qu’ils évitent le scandale public d’une manière analogue à celle que font les catéchumènes, les candidats au baptême. Le Rapport Final omet d’appeler les divorcés remariés à l’humble reconnaissance objective de leur état pécheur et on empêche ainsi de les encourager à accepter avec l’esprit de la foi leur non-admission aux sacrements et aux rôles publics catéchétiques et liturgiques. Sans une telle reconnaissance réaliste et humble de leur état spirituel réel, il n’y a pas un progrès effectif vers la conversion chrétienne authentique qui, dans le cas des divorcés remariés, consiste en une vie de continence complète, cessant de pécher contre la Sainteté du Sacrement du Mariage et désobéissant publiquement au Sixième Commandement de Dieu.

Les Pasteurs de l’Église, et en particulier les textes publics du Magistère, ont à parler d’une manière la plus claire possible car c’est la caractéristique essentielle des tâches de l’enseignement officiel. Le Christ a demandé à tous ses disciples de parler d’une manière extrêmement claire : « Si c’est oui, dites « oui », si c’est non, dites « non », tout simplement ; ce que l’on dit en plus vient du Mauvais ». (Math 5 : 37). Ceci est encore plus valable lorsque les Pasteurs de l’Église prêchent ou quand le Magistère parle dans un document.

Dans la section de texte des numéros 84-86, le Rapport Final représente, malheureusement, un écart grave de ce Commandement Divin. En effet, dans les passages mentionnés, le texte ne plaide pas directement en faveur de la légitimité de l’admission des divorcés et remariés à la Sainte Communion, le texte évite même les expressions « la Sainte Communion » ou « les Sacrements ». Au lieu de cela, le texte, à l’aide de tactiques obscures, utilise des expressions ambiguës comme « une participation plus entière à la vie de l’Église » et « le discernement et l’intégration ».

Par de telles tactiques obscures, le Rapport Final, en fait, pose des bombes à retardement et possède une porte arrière pour l’admission des divorcés remariés à la Sainte Communion, provoquant par là une profanation des deux grands Sacrements du Mariage ainsi que de l’Eucharistie et contribuant au moins indirectement à la culture du divorce — à la propagation du « fléau du divorce » (Concile Vatican II, Gaudium et Spes, 47).

Lors de la lecture attentive du texte ambigu portant sur « le discernement et l’intégration » dans le Rapport Final, on a l’impression d’une ambiguïté très habile et élaborée. On se souvient de ces paroles de Saint Irénée dans son « Adversus haereses » : « Ainsi en va-t-il de celui qui garde en soi, sans l’infléchir, la règle de Vérité qu’il a reçue par son baptême : il pourra reconnaître les noms, les phrases et les paraboles provenant des Écritures, il ne reconnaîtra pas le système blasphématoire inventé par ces gens-là. Il reconnaîtra les pierres de la mosaïque, mais il ne prendra pas la silhouette du renard pour le portrait du Roi. En replaçant chacune des paroles dans son contexte et en l’ajustant au corps de la vérité, il mettra à nu leur fiction et en démontrera l’inconsistance.

Puisqu’à ce vaudeville il ne manque que le dénouement, c’est-à-dire que quelqu’un mette le point final à leur farce en y adjoignant une réfutation en règle, nous croyons nécessaire de souligner avant toute autre chose les points sur lesquels les pères de cette fable diffèrent entre eux, inspirés qu’ils sont par différents esprits d’erreur. Déjà par là, en effet, il sera possible de saisir exactement, avant même que nous n’en fournissions la démonstration, et la solide vérité proclamée par l’Église et le mensonge échafaudé par ces gens-là ».(I, 9, 4-5).

Le Rapport Final semble laisser la solution de la question de l’admission des divorcés remariés à la Sainte Communion aux autorités locales de l’Église : « accompagnement des prêtres » et « orientations de l’Évêque ». Une telle question est cependant essentiellement connectée avec le Dépôt de la Foi, c’est-à-dire la Parole révélée de Dieu. La non-admission des divorcés qui vivent dans un état d’adultère public appartient à la Vérité immuable de la loi de la foi Catholique et, par conséquent aussi à la loi de la pratique liturgique Catholique.

Le Rapport Final semble entreprendre une cacophonie doctrinale et disciplinaire dans l’Église Catholique, ce qui contredit l’essence même de l’être Catholique. On doit rappeler ici les paroles de Saint Irénée à propos de la forme authentique de l’Église Catholique en tout temps et en tous lieux : « L’Église, ayant donc reçu cette prédication et cette foi, ainsi que nous venons de le dire, l’Église, bien que dispersée dans le monde entier, les garde avec soin, comme n’habitant qu’une seule maison, elle y croit d’une manière identique, comme n’ayant qu’une seule âme et qu’un même cœur, et elle les prêche, les enseigne et les transmet d’une voix unanime, comme ne possédant qu’une seule bouche.
Car, si les langues diffèrent à travers le monde, le contenu de la Tradition est une et identique. Et ni les Églises établies en Germanie n’ont d’autre foi ou d’autre Tradition, ni celles qui sont chez les Ibères, ni celles qui sont chez les Celtes, ni celles de l’Orient, de l’Égypte, de la Libye, ni celles qui sont établies au centre du monde; mais, de même que le soleil, cette créature de Dieu, est un et identique dans le monde entier, de même cette lumière qu’est la prédication de la vérité brille partout et illumine tous les hommes qui veulent « parvenir à la connaissance de la vérité ». Et ni le plus puissant en discours parmi les chefs des Églises ne dira autre chose que cela — car personne n’est au-dessus du Maître —, ni celui qui est faible en paroles n’amoindrira cette Tradition : car, la foi étant une et identique, ni celui qui peut en disserter abondamment n’a plus, ni celui qui n’en parle que peu n’a moins. »(Adversus haereses, I, 10 , 2).

Le Rapport Final dans la section sur les divorcés remariés évite soigneusement de déclarer le principe immuable de toute la Tradition Catholique, à savoir que ceux qui vivent dans une union conjugale invalide peuvent être admis à la Sainte Communion que sous la condition qu’ils aient promis de vivre en complète continence et qu’ils évitent un scandale public. Jean-Paul II et Benoît XVI ont confirmé fortement ce principe catholique. Le refus délibéré de mentionner et de réaffirmer ce principe dans le texte du Rapport Final peut être comparé avec l’évitement systématique de l’expression « homoousios » (note : qui veut dire « de substance semblable ») au nom des adversaires du Dogme du Conseil de Nicée au quatrième siècle — les Ariens formels et les soi-disant semi-Ariens — qui inventaient continuellement d’autres expressions pour ne pas avouer directement la consubstantialité du Fils de Dieu avec Dieu le Père.

Ce refus d’une déclaration Catholique publique au nom de la majorité de l’épiscopat au quatrième siècle a causé une activité ecclésiastique fébrile avec des réunions synodales continues et une prolifération de nouvelles formules doctrinales dont le dénominateur commun était d’éviter la clarté terminologique, c’est-à-dire l’expression « homoousios ». De même, de nos jours, les deux derniers Synodes sur la famille ont évité de nommer et d’avouer clairement le principe de toute la Tradition Catholique, à savoir que ceux qui vivent dans une union conjugale invalide peuvent être admis à la Sainte Communion seulement sous la condition qu’ils promettent de vivre dans la continence complète et qu’ils évitent le scandale public.

Ce fait est aussi prouvé par la réaction immédiate sans équivoque des médias séculiers et par la réaction des principaux défenseurs de la pratique non-catholique d’admettre les divorcés remariés à la Sainte Communion tout en maintenant une vie adultère publique. Le cardinal Kasper, le cardinal Nichols, l’archevêque Forte, par exemple, ont affirmé publiquement que, selon le Rapport Final , on peut supposer qu’une porte a été en quelque sorte ouverte en faveur de la Communion pour les divorcés remariés. Il existe ainsi un nombre considérable d’évêques, de prêtres et de laïcs qui se réjouissent de la soi-disant « porte ouverte » qu’ils ont trouvée dans le Rapport Final. Au lieu de guider les fidèles avec la plus grande clarté et un enseignement sans ambiguïté, le Rapport Final a provoqué une situation d’obscurcissement, de confusion, de subjectivité (le jugement de la conscience des personnes divorcées et un for interne) et un particularisme doctrinal et disciplinaire non catholique dans une matière qui est essentiellement liée au Dépôt de la foi transmise par les Apôtres.

Ceux qui de nos jours défendent fermement la sainteté des Sacrements de l’Eucharistie et du Mariage sont étiquetés comme Pharisiens. Pourtant, comme le principe logique de la non-contradiction est valide et que le bon sens commun est toujours valable, le contraire est vrai.

Pour arriver à concilier une vie dans l’adultère avec la réception de la Sainte Communion, les vrais Pharisiens ont inventé habilement de nouvelles lettres, une nouvelle loi de « discernement et d’intégration » l’introduction de nouvelles traditions humaines contre le Commandement de Dieu qui est clair comme le cristal. Aux défenseurs du soi-disant « Agenda Kasper », il leur est adressé ces Paroles de la Vérité Incarnée : « De cette façon, vous annulez l’exigence de la parole de Dieu par la tradition que vous transmettez. Et vous faites beaucoup d’autres choses semblables. » (Marc 7 : 13). Ceux qui ont parlé pendant 2000 ans sans relâche et avec la plus grande clarté sur l’immuabilité de la Vérité Divine, souvent au prix de leur propre vie, seraient aussi étiquetés comme Pharisiens de nos jours ; ainsi en serait-il pour Saint Jean-Baptiste, Saint Paul, Saint Irénée, Saint Athanase, Saint Basile, Saint Thomas More, St. John Fisher, Saint Pie X, pour ne citer que les exemples les plus élogieux.

Le résultat réel du Synode dans la perception des fidèles et de l’opinion publique laïque a été qu’il y a pratiquement eu un seul point central portant sur la question de l’admission de la Sainte Communion aux divorcés. On peut affirmer que le Synode s’est avéré en un certain sens être aux yeux de l’opinion publique un Synode de l’adultère, et non pas le Synode de la famille. En effet, toutes les belles affirmations du Rapport Final sur le mariage et la famille sont éclipsées par les affirmations ambiguës dans la section de texte sur les divorcés et remariés, un sujet qui a déjà été confirmé et décidé par le Magistère des Derniers Pontifes Romains en conformité fidèle à l’enseignement et à la pratique bi-millénaire de l’Église. Par conséquent, c’est une véritable honte que les Évêques Catholiques, les Successeurs des Apôtres, aient utilisé des assemblées synodales afin de faire une tentative sur la pratique immuable et constante de l’Église sur l’indissolubilité du mariage, c’est-à-dire la non-admission des divorcés qui vivent dans une union adultère aux Sacrements.

Dans sa lettre au Pape Damase, Saint-Basile a dressé un tableau réaliste de la confusion doctrinale causée par des Ecclésiastiques qui cherchaient un compromis vide et une adaptation à l’esprit du monde en son temps : « Les Traditions sont réduites à néant ; les figures de style des innovateurs sont en vogue dans les églises ; maintenant les hommes sont plutôt des agenceurs de systèmes trompeurs que des théologiens ; la sagesse de ce monde remporte les plus hauts prix et a rejeté la Gloire de la Croix. Les aînés se plaignent quand ils comparent le présent avec le passé. Les plus jeunes sont à encore plus à plaindre car ils ne savent pas ce dont ils ont été privés »(Ep. 90, 2).

Dans une lettre au Pape Damase et aux Évêques d’Occident, Saint Basile décrit comme suit la situation confuse à l’intérieur de l’Église : « Les lois de l’Église sont dans la confusion. L’ambition des hommes, qui n’ont aucune crainte de Dieu, se précipitent dans des postes élevés et une fonction exaltée est maintenant connue publiquement comme le prix de l’impiété. Le résultat est que plus un homme blasphème, plus digne est-il pour les gens d’être nommé Évêque. La dignité cléricale est une chose du passé. Il n’y a pas une connaissance précise des canons. Il y a une immunité totale envers le péché ; car quand les hommes ont été nommés dans leurs fonctions par la faveur des hommes, ils sont obligés de retourner la faveur en montrant continuellement de l’indulgence pour les contrevenants. Le juste jugement est une chose du passé ; et tout le monde se comporte selon le désir de son cœur. Les hommes en autorité ont peur de parler car ceux qui ont atteint le pouvoir par intérêt humain sont les esclaves de ceux à qui ils doivent leur avancement. Et maintenant, la justification même de l’orthodoxie est considérée dans certains milieux comme une opportunité pour l’attaque mutuelle ; et les hommes cachent leur rancoeur et prétendent que leur hostilité est exclusivement due à l’amour de la vérité. Pendant tout ce temps, tous les incroyants en rient ; les hommes de peu de foi sont ébranlés ; la foi est incertaine ; les âmes sont trempées dans l’ignorance parce que falsificateurs de la Parole imitent la Vérité. Les laïcs les meilleurs fuient les églises considérées comme des écoles d’impiété et lèvent leurs mains dans les déserts avec des soupirs et des larmes à leur Seigneur au Ciel. Nous avons reçu la foi des Pères ; cette foi que nous connaissons est gravée des marques des Apôtres ; nous donnons notre assentiment à cette foi ainsi qu’à tout ce qui a été canoniquement et légalement promulgué dans le passé ». (Ep. 92, 2).

Chaque période de confusion au cours de l’histoire de l’Église est en même temps une possibilité pour recevoir de nombreuses grâces de force et de courage ainsi qu’une chance pour chacun de manifester son amour pour le Christ, la Vérité Incarnée. Chaque baptisé, chaque prêtre et chaque évêque Lui a promis une fidélité inviolable, chacun selon son état : à travers le vœux de baptême, à travers les promesses sacerdotales ou par la promesse solennelle de l’ordination épiscopale. En effet, tous les candidats à l’épiscopat ont promis : « Je garderai pure et intègre le Dépôt de la Foi selon la Tradition qui a toujours et partout été conservée dans l’Église ». L’ambiguïté trouvée dans la section sur les divorcés remariés du Rapport Final contredit le vœu solennel épiscopal susmentionné. Malgré cela, tout le monde dans l’Église — du simple fidèle aux détenteurs du Magistère — devrait dire :

« Non possumus ! » * Je n’accepterai pas un discours occulté ni une porte arrière (moyens détournés) habilement masquée en vue de profaner les Sacrements du Mariage et de l’Eucharistie. De même, je n’accepterai pas une moquerie du Sixième Commandement de Dieu. Je préfère être ridiculisé et persécuté plutôt que d’accepter des textes ambigus et des méthodes hypocrites. « ! Scio, Cui credidi » Je préfère l’ « image cristalline du Christ la Vérité plutôt que cette détestable image du renard orné de pierres précieuses » (Saint Irénée) car « Je sais en qui j’ai mis ma confiance » (2 Tim 1 : 12 ).

Le 2 novembre 2015

+ Athanasius Schneider, Évêque auxiliaire
de l’Archidiocèse de Saint Mary à Astana

* Locution latine signifiant « Nous ne pouvons pas » qui fut dite par les Apôtres en réponse aux Juifs qui leur interdisaient de prêcher l’Évangile. Expression utilisée pour exprimer un refus catégorique avec cette nuance qu’il ne dépend pas de la personne sollicitée d’accorder la demande. (Orig. : Actes des Apôtres, IV, 20).

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Rapport final du Synode ordinaire des Évêques sur la famille en 2015

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Extraits des numéros 84, 85, 86 portant sur les Divorcés/Remariés et les Unions libres ou en cohabitation

Numéro 84

84. Les baptisés qui sont divorcés et remariés civilement doivent être davantage intégrés à la communauté chrétienne selon les différentes façons possibles, en évitant toute occasion de scandale. La logique de l’intégration est la clé de leur accompagnement pastoral, afin qu’ils sachent non seulement qu’ils appartiennent au corps du Christ qu’est l’Église, mais qu’ils puissent aussi en avoir une joyeuse et féconde expérience. Ce sont des baptisés, ce sont des frères et des soeurs, l’Esprit Saint déverse en eux des dons et des charismes pour le bien de tous. Leur participation peut s’exprimer dans divers services ecclésiaux : il convient donc de discerner quelles sont, parmi les diverses formes d’exclusion actuellement pratiquées dans les domaines liturgique, pastoral, éducatif et institutionnel, celles qui peuvent être dépassées. Non seulement ils ne doivent pas se sentir excommuniés, mais ils doivent pouvoir vivre et grandir comme membres vivants de l’Église, sentant en elle une mère qui les accueille toujours, prend soin de leurs sentiments, et les encourage sur le chemin de la vie et de l’Évangile. Cette intégration est aussi nécessaire pour le soin et l’éducation chrétienne de leurs enfants, qui doivent être considérés comme les plus importants. Pour 41 la communauté chrétienne, prendre soin de ces personnes ne constitue pas un affaiblissement de la foi et du témoignage sur l’indissolubilité du mariage : au contraire, par cette attention justement, l’Église exprime sa charité. |187-72|

Numéro 86

Le parcours d’accompagnement et de discernement oriente ces fidèles vers la prise de conscience de leur situation devant Dieu. La discussion avec le prêtre, dans le for interne, concourt à la formation d’un jugement correct sur ce qui fait obstacle à la possibilité d’une participation plus pleine à la vie de l’Église et sur les étapes qui peuvent la favoriser et la faire grandir. Dans la mesure où il n’y a pas de gradualité dans cette loi (cf. FC, 34) (48), ce discernement ne pourra jamais faire abstraction des exigences de vérité et de charité de l’Évangile proposées par l’Église. Pour que cela se produise, il faut garantir les conditions nécessaires d’humilité, de discrétion, d’amour de l’Église et de son enseignement, dans la recherche sincère de la volonté de Dieu et dans le désir de lui répondre de façon plus parfaite. |190-64|

Numéro 85

Les baptisés qui sont divorcés et remariés civilement doivent être davantage intégrés à la communauté chrétienne selon les différentes façons possibles, en évitant toute occasion de scandale. La logique de l’intégration est la clé de leur accompagnement pastoral, afin qu’ils sachent non seulement qu’ils appartiennent au corps du Christ qu’est l’Église, mais qu’ils puissent aussi en avoir une joyeuse et féconde expérience. Ce sont des baptisés, ce sont des frères et des soeurs, l’Esprit Saint déverse en eux des dons et des charismes pour le bien de tous. Leur participation peut s’exprimer dans divers services ecclésiaux : il convient donc de discerner quelles sont, parmi les diverses formes d’exclusion actuellement pratiquées dans les domaines liturgique, pastoral, éducatif et institutionnel, celles qui peuvent être dépassées. Non seulement ils ne doivent pas se sentir excommuniés, mais ils doivent pouvoir vivre et grandir comme membres vivants de l’Église, sentant en elle une mère qui les accueille toujours, prend soin de leurs sentiments, et les encourage sur le chemin de la vie et de l’Évangile. Cette intégration est aussi nécessaire pour le soin et l’éducation chrétienne de leurs enfants, qui doivent être considérés comme les plus importants. Pour 41 la communauté chrétienne, prendre soin de ces personnes ne constitue pas un affaiblissement de la foi et du témoignage sur l’indissolubilité du mariage : au contraire, par cette attention justement, l’Église exprime Saint Jean-Paul II nous a offert un critère général qui reste la base pour l’évaluation de ces situations : « Les pasteurs doivent savoir que, par amour de la vérité, ils ont l’obligation de bien discerner les diverses situations. Il y a en effet une différence entre ceux qui se sont efforcés avec sincérité de sauver un premier mariage et ont été injustement abandonnés, et ceux qui par une faute grave ont détruit un mariage canoniquement valide. Il y a enfin le cas de ceux qui ont contracté une seconde union en vue de l’éducation de leurs enfants, et qui ont parfois, en conscience, la certitude subjective que le mariage précédent, irrémédiablement détruit, n’avait jamais été valide » (FC, 84) (46). Il est donc du devoir des prêtres d’accompagner les personnes concernées sur la voie du discernement selon l’enseignement de l’Église et les orientations de l’évêque. Dans ce processus, il sera utile de faire un examen de conscience, par des moments de réflexion et de pénitence. Les divorcés remariés devraient se demander comment ils se sont comportés vis-à-vis de leurs enfants quand leur union conjugale est entrée en crise ; s’il y a eu des tentatives de réconciliation ; quelle est la situation du conjoint abandonné ; quelles conséquences a la nouvelle relation sur le reste de la famille et la communauté des fidèles ; quel exemple elle offre aux jeunes qui doivent se préparer au mariage. Une réflexion sincère peut renforcer la confiance dans la miséricorde de Dieu qui ne doit être refusée à personne. En outre on ne peut nier que dans certaines circonstances « l’imputabilité et la responsabilité d’une action peuvent être diminuées voire supprimées » (CEC, 1735) du fait de divers conditionnements. En conséquence, le jugement sur une situation objective ne doit pas mener à un jugement sur « l’imputabilité subjective » (Conseil pontifical pour les textes législatifs, Déclaration du 24 juin 2000, 2a) (47). Dans certaines circonstances, les personnes rencontrent de grandes difficultés à agir différemment. Tout en maintenant une norme générale, il est donc nécessaire de reconnaître que la responsabilité par rapport à certaines actions ou décisions n’est pas la même dans tous les cas. Le discernement pastoral, en tenant compte de la conscience de chacun formée de façon droite, doit prendre en charge ces situations. Il en est de même pour les conséquences des actes accomplis, qui ne sont pas nécessairement les mêmes dans tous les cas. |178-80|

dieuetmoilenul.blogspot.ru/…/reaction-de-mgr…

SOURCE : Rorate Caeli

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A noter également la très complète analyse d’Aline Lizotte.

FIGAROVOX/ENTRETIEN – Alors que s’achève le synode sur la famille, Aline Lizotte estime que l’on risque d’aller en pratique, non vers un «divorce à la catholique» mais vers une sorte de conception protestante de la liberté de conscience.


Aline Lizotte est docteur canonique en philosophie et directrice de l’Institut Karol Wojtyla. D’origine canadienne, elle est l’une des références internationalement reconnues dans l’Eglise catholique sur les questions d’éthique conjugale et de la sexualité. En philosophe, elle analyse les résultats du récent synode sur la famille.


LE FIGARO. – Même s’il n’a pas pris position pour éviter un vote négatif d’une partie des évêques, le synode a suggéré au pape, et cela a été voté, que la question de la communion des divorcés remariés ne soit plus réglée par un oui ou par un non, mais à travers un «discernement» au cas par cas, selon des critères préétablis par l’Eglise: est-ce une évolution notable de la théologie morale catholique?

Aline LIZOTTE. – Les numéros 84, 85 et 86 de la relation synodale sont pour le moins confus sinon ambigus. On n’y parle pas directement d’interdiction ou de permission de communier, mais de trouver les divers modes d’intégration en vue d’une meilleure participation à la vie communautaire chrétienne.

Parmi ces différents modes d’intégration, il y aurait la permission de devenir parrains, de faire la catéchèse, de lire les textes à la messe, bref, de participer aux actes qui préparent à la vie sacramentelle.

Mais il y a aussi la possibilité de communier. Jean Paul II n’était pas allé aussi loin. Tout en refusant fermement la possibilité de participer à la communion, il avait, lui aussi, bien affirmé que les divorcés faisaient partie de la communauté chrétienne – ils n’étaient pas excommuniés – et qu’ils devaient s’unir à la prière de l’Eglise, participer au sacrifice eucharistique et prendre part aux oeuvres de charité sociales.

Aujourd’hui le numéro 84 du document final va plus loin, puisqu’il parle de «dépasser» les «exclusions» dans le domaine liturgique, éducatif, pastoral et … «institutionnel». Ce mot est vague mais il est très important car il peut tout désigner dans l’Eglise. Qu’est ce qui empêcherait en effet un divorcé remarié de devenir diacre…

Quant au numéro 85, il exagère une distinction capitale pourtant clairement établie par Jean-Paul II et qui appartient depuis toujours à la théologie morale: cette distinction, exprimée dans Veritatis Splendor (nos 54-64) et dans la somme théologique de saint Tomas d’Aquin Ia-IIae, q.18, a.3, permet de faire une différence entre ce qui est «objectif» dans un choix moral et ce qui dépend des «circonstances». Mais, le document final donne, aux circonstances, une importance démesurée qu’elle n’a pas dans l’équilibre classique de la théologie morale.

On introduit donc un déséquilibre?

On veut donner plus de place, désormais, aux circonstances. Or la distinction classique montre qu’il y a des actes moraux qui sont objectivement graves, même si, effectivement, certaines circonstances, propres à la personne, permettent d’en diminuer la responsabilité, voire de l’annuler.

Il y a donc une différence entre la réalité objective d’un acte et ce que l’on appelle «l’imputabilité» de l’acte, sa charge morale, si je puis dire, qui repose, ou non, sur les épaules de celui qui a commis cet acte. C’est ce qu’enseigne le Catéchisme de l’Eglise Catholique (no 1735). Jean-Paul II a d’ailleurs appliqué cette distinction au discernement pastoral des pasteurs et des confesseurs lors de la direction spirituelle des consciences.

Et cette distinction – appliquée à l’échec d’un mariage et le divorce – éclaire la culpabilité dans la conscience morale. Car une chose est une séparation qui aboutit à un divorce dont l’auteur a tout fait pour plaquer son conjoint en l’abandonnant à sa solitude avec la charge de ses enfants ; une autre chose est l’état du conjoint «ainsi répudié» qui a tout tenté pour conserver son engagement matrimonial et qui se trouve acculé à un état de vie, difficile ou quasi impossible. Un état dont il ne porte pas la responsabilité. C’est une victime.

Surgit alors cette question cruciale: cette personne – homme ou femme – en se remariant commet-elle un péché «d’adultère» qui, en tant que péché, l’entrainerait à s’éloigner de la communion? Et peut-on la juger de la même manière que son conjoint qui l’a plaquée et qui s’est remarié?

Que répond sur ce point le Synode?

Sur ce point la relation synodale est loin d’être claire…Elle est même ambigüe!

Pourquoi?

Nous sommes, en effet, face à deux actes objectivement différents: Une chose est de ne pas se juger coupable, au for interne, c’est-à-dire dans sa conscience, de l’échec de son mariage et même d’aller jusqu’à la conclusion intime que ce mariage était invalide. Autre chose est de s’appuyer sur cette seule conscience – même assisté par un conseiller spirituel, voire d’un évêque – pour prendre la décision de se remarier. En se disant, en somme, je ne suis pas coupable – en conscience – de l’échec de mon mariage, j’ai même la conviction intime que mon premier mariage est invalide ; en me remariant, je ne commets donc pas un adultère ainsi je peux communier.

Or, et c’est là le fond du problème, la condition de commettre, ou de ne pas commettre un adultère, ne dépend pas uniquement des conditions intérieures du jugement de conscience mais elle dépend de la validité, ou de la non validité du premier mariage.

Ce qui ne relève pas uniquement du for interne de l’un des conjoints, ou, autrement dit de sa seule conscience profonde, mais du for externe, c’est-à-dire des critères objectifs de la loi! Donc, déterminer de la validité ou non, d’un consentement – fondateur du mariage – n’est pas une question de conscience qui n’appartiendrait qu’à un seul des deux conjoints. Ce sont les deux personnes qui sont engagées.

Il ne s’agit pas simplement de se dire: «je sens, j’ai toujours pensé, que mon mariage n’était pas valide»… Certes, la conscience peut-être loyale, mais elle peut-être aussi objectivement erronée. En ce sens, il est inexact de dire comme le proclame Mgr Cupich, l’archevêque de Chicago, que la conscience est toujours inviolable.

Je parle donc d’ambiguïté parce que les critères donnés au n°85 du document final du synode sont justement prévus pour aider la personne, son confesseur et même son évêque à juger de la droiture et de l’honnêteté de sa conscience. Mais, je regrette, ces critères ne sont pas suffisants pour conclure avec certitude de la validité ou de la non validité du premier mariage.

Quels risques voyez-vous?

Agir dans ce sens va conduire à mettre en place une sorte de système de «consulting spirituel», de coaching interne qui aideront les consciences à ne plus se sentir coupables d’un remariage. Fortes de leur subjectivité elles estimeront avoir le droit à un remariage en bonne et due forme. Ce n’est pas par hasard que Jean-Paul II, pour énoncer l’interdiction de la communion pour les divorcés remariés, avait bien pris soin d’établir cette distinction qui démontrait que «l’examen de conscience» dont parle aujourd’hui le document final n’est pas suffisant pour évaluer la situation objective et la situation du conjoint lésé.

Cette ouverture, doublée de la facilitation des procédures d’annulation canonique du lien du mariage décidée par le pape François en septembre dernier, ne contribue-t-elle pas à créer, dans l’opinion, l’idée que l’Eglise vient d’inventer le «divorce catholique»?

Pour l’Église catholique le problème auquel elle doit faire face n’est pas celui des divorcés remariés mais celui de la crédibilité de son mariage. En quoi sa doctrine du mariage a-t-elle encore une influence sur la vie des gens et même sur ses propres fidèles… Mais d’où vient le problème? Vient-il du changement sociétal, assez impressionnant ou vient-il des insuffisances d’une pastorale inadéquate? On pensait la doctrine acquise, on s’aperçut que ce ne l’était pas. Dans cette perspective, il faut bien comprendre que le problème des divorces remariés apparaît comme un cas type, sur lequel on réfléchit comme sur un cas le plus difficile à résoudre. On a espéré le résoudre uniquement par la voie pastorale… sans changer les affirmations doctrinales. Mais cela touche à la quadrature du cercle car la pastorale découle de la doctrine! Elle est, en prudence, son application. Changer une pastorale sans changer de doctrine dans les points essentiels de cette doctrine, c’est un problème impossible à résoudre. La doctrine de l’Église catholique est en effet claire et ferme: un mariage validement célébré (ratum) et consommé (consumatum) est indissoluble. J’ajoute que la facilité que donnent les législations civiles, divorce à l’amiable, pacs, admission du concubinage, rend l’engagement absolu et pour toute la vie moins tentant. Les difficultés conjugales s’amoncelant on recourt donc à une législation civile pour rompre un mariage et même en contracter un second ou un troisième. Mais, en doctrine, ces mariages, sont pour l’Église, «nuls» au sens juridique et aucun ne rompt la validité du premier mariage si ce dernier est déclaré valide.

Si l’ouverture qu’amorce ce synode sur le jugement de conscience, jointe à la facilité des procédures qui sera mis en vigueur par le Motu Proprio Mitis Iudex Dominus Iesus e Mitis et Misericors Iesus du 8 septembre 2015, pour l’obtention d’un décret de nullité on risque d’aller en pratique, non vers un «divorce à la catholique» mais vers une sorte de conception protestante de la liberté de conscience. Car la conscience, comme je viens de l’expliquer ne peut pas seulement se fonder sur le seul ressenti qu’elle perçoit, ou non, de la gravité de ses actes, mais sur des critères objectifs de la loi morale.

L’Eglise, sur ce point, manque-t-elle de «cœur» comme l’a dit le Pape? N’est-elle pas trop dure en ne parlant que de «loi»? Sur quoi l’Eglise se fonde-t-elle, au juste, pour affirmer qu’un premier mariage, s’il est valide, donc librement consenti et pour la vie, est par nature indissoluble? Et pourquoi ne peut-elle pas évoluer sur l’indissolubilité du mariage?

L’Église peut évoluer sur des questions qui découle de son droit propre. Ainsi elle évolue sur beaucoup de questions: réformes liturgiques, réforme de la pénitence pendant le carême, réforme sur les fêtes de préceptes, reforme sur l’état clérical, reforme sur l’exercice de l’autorité dans l’Église (collégialité), reforme de procédures sur les demandes de décret de nullité du mariage, réforme sur les vœux de religion. Depuis Vatican II, on a vu s’abattre une somme de réformes qui ont façonné de façon directe notre comportement extérieur vis-à-vis de Dieu et notre agir communautaire envers nos frères. Les réformes ont d’ailleurs été tellement importantes qu’il a fallu réécrire et promulgué une nouveau Droit Canon (1983).

Mais il y a des domaines qui ne sont pas du droit de l’Église. D’abord parce qu’aucun Pape n’a fondé et ne fonde l’Église. C’est toujours Jésus-Christ qui bâtit son Eglise. Ensuite parce que le Christ a laissé à l’Église des moyens de participer à sa vie, à sa prière, à son mystère de salut, moyens qui sont liés à sa volonté: ce sont les sacrements et leur substance sur lesquels l’Église n’a aucun pouvoir. Il faut toujours de l’eau pour baptiser ; il faut toujours du pain et du vin pour une consécration eucharistique ; il faut toujours une accusation orale des péchés – on ne peut faire cela par correspondance ou par internet – pour recevoir le sacrement de la Réconciliation. Enfin il faut toujours que l’homme quitte son père et sa mère et s’attache à sa femme, pour qu’un consentement matrimonial ait valeur de sacrement. Cette substance sacramentelle n’appartient pas à l’Église.

Ainsi, le mariage que Dieu a institué est hétérosexuel, monogame, indissoluble et ouvert à la vie. Ces propriétés du mariage l’Église ne les invente pas, elle les reçoit du Christ lui-même. Si elle peut changer la discipline, par exemple, l’âge de la première communion, le ministre du baptême, les conditions de l’onction des malades etc ; elle ne peut changer la substance du sacrement. Or, l’indissolubilité fait partie essentiellement du sacrement du mariage.. Et sur cette question l’Église n’a aucun pouvoir d’en changer.

Mais les personnes, ces couples qui ont vécu un échec, l’Eglise peut-elle ignorer leur souffrance? Ce fut une demande constante pendant ces vingt jours de synode?

Pour l’Église catholique, ce problème des divorcés remariés est un problème épineux. Il y a là une structure de péché, c’est-à-dire, une situation qui porte à user du mariage comme si on était marié alors qu’on ne l’est pas, puisque le premier mariage est toujours valide. Cependant, dans l’Église, ces personnes ne sont pas exclues de la communauté chrétienne. Elles sont comme tous les chrétiens, conviés à la participation à l’Eucharistie du dimanche. Cependant, elles ne peuvent pas communier. Convoquées à un sacrifice de communion, elles ne peuvent pas y participer pleinement.

Poser la question sur les divorcés remariés c’est donc réfléchir sur le cas type par excellence.

C’est dur à dire mais sur le plan canonique et philosophique ces personnes se sont mises volontairement et peut-être inconsciemment dans une situation impossible. Elles usent d’un droit qu’elles n’ont pas, car elles sont liées – par leur parole donnée sacramentellement – à une autre personne. Non seulement, elles ne respectent plus la parole donnée devant Dieu mais elles usurpent le droit de l’autre, de la femme abandonnée du mari humilié. Certes elles se justifient en invoquant l’échec du premier mariage et la réussite du second. Pourquoi leur refuserait-on donc le droit de «refaire leur vie»? Pourquoi même, si l’on dit qu’elles ne sont pas exclues de la communauté chrétienne, leur refuserait-on le droit à la communion? Cette communion n’est-elle pas le signe de l’appartenance à la communauté? Toute la communauté est invitée, à la Messe, au festin des Noces de l’Agneau? Pourquoi pas eux? Souvent, ils vivent honnêtement, en toute fidélité et dévouement au nouvel époux ou épouse, ayant de nouveaux enfants, ayant une nouvelle famille? Pourquoi ce durcissement de la pastorale qui se veut avant tout fidèle à une doctrine juste, mais qui semble surtout manquer de miséricorde? Voilà le dilemme que l’on pose entre le doctoral et le pastoral! Mais la question est de savoir si ce dilemme est réellement un dilemme doctoral vis-à-vis d’une pastorale inadéquate? Ou une mauvaise façon de poser le problème…

Et permettez-moi d’ajouter que le fait d’avoir introduit le jugement de conscience dans la mêlée, n’a rien éclairci, au contraire, cela pose encore plus de problèmes. Quels sont les chrétiens, les catholiques, qui savent vraiment ce qu’est un jugement de conscience, qui sont capables du discours moral qu’il demande ou qui en ont même le courage? Quels sont les pasteurs suffisamment aptes à aider le chrétien à poser ce jugement de conscience? Car un jugement de conscience ne part pas de son état subjectif, de son psychisme, de son désir, mais il doit toujours partir de la loi? Un épouse délaissée peut avoir conscience que dans l’échec de son mariage, elle n’y est pour rien – c’est un cas rare – mais lorsqu’elle examine une décision à prendre sur un remariage la conscience doit poser objectivement la question: en conscience, je ne suis pas coupable de l’échec de mon premier mariage, mais si ce premier mariage est valide, l’échec me donne-t-il le droit moral de me remarier civilement?

En attendant, affirme le pape François, l’Église a comme le devoir de chercher une voie nouvelle pour venir en aide aux difficultés concrètes des divorcés remariés…

L’Église a toujours le devoir de venir en aide à tous ses enfants et l’obligation de ne pas alourdir le joug que peut constituer l’obéissance aux devoirs du chrétien. «Mon joug et doux et mon fardeau léger Mt XI,30, dit le Seigneur. La mission de l’Église n’est pas de le rendre impossible à porter. Ce joug est doux et ce fardeau léger parce que le Seigneur donne la grâce de le porter. Mais quelles sont les vraies difficultés des divorcés remariés? Celles de ne pas communier? On nous parle d’eux comme des gens heureux ayant réussi un second mariage alors que le premier a échoué. Mais ce mariage échoué, cette femme abandonnée, cet homme méprisée, ces enfants ballotées, celui ou celle que l’on charge de tous les torts, de toutes les malveillances, on n’arrive pas à l’oublier. Même s’il y a eu divorce et qu’il était raisonnable de demander le divorce, la nouvelle femme, le nouvel homme qui habite un nouveau lit, n’y trouve pas en réalité un véritable lieu conjugal car le passé est toujours présent, chez un être humain il ne peut s’effacer. Cette plainte revient très souvent: je l’aime toujours, même si je trouve un bonheur sexuel avec l’autre. Et il faut affronter la révolte et la honte des enfants. Que l’on divorce, oui si c’est nécessaire, cela vaut mieux que les continuels affrontements, les violences verbales, les mensonges répétés. Mais que le conjoint qui part se remarie, cela créé une sourde révolte qui est un tabou dans notre société. Plus ils sont adultes, plus les enfants sont révoltés. Ils seront maintenant des enfants de divorcés. Et cela ne s’avale pas facilement!

La voie nouvelle n’est donc pas la communion eucharistique. Elle risque fort d’amplifier la souffrance comme, si en plus d’avoir trompé sa femme ou son mari, on en venait à tromper aussi Dieu. C’est terrible à dire mais chacun sait, au fond de lui, s’il y croit un tant soi peu qu’on ne trompe pas Dieu. Pour suivre et conseiller de nombreuses situations de ce genre dans le cadre de l’Institut Karol Wojtyla je peux vous affirmer, non sur la base d’une théorie, mais sur celle de l’expérience et de témoignages douloureux que ce sentiment intérieur, ce sensus fidei, qui demeure tapi dans la conscience profonde de ces époux brisés est plus fort que toute concession juridique si jamais l’autorisation de la communion devenait une concession juridique.

C’est pourtant la voie que François semble bien vouloir ouvrir…

Oui, il faut une pastorale nouvelle pour les divorcés remariés, comme il en faut une pour les concubins qui demandent le mariage, comme il en faut une pour ceux qui sont civilement mariés et qui «veulent se mettre en règle». Il faut une pastorale qui fasse comprendre que le mariage sacramentel n’est pas une permission de «coucher ensemble» sans faire de péché. Mais que le sacrement de mariage donne, aux époux, une participation particulière à entrer dans le mystère d’alliance proposé par Dieu à toute l’humanité. Mystère dont le Christ est le garant en devenant l’Epoux de l’Église. La vérité du sacrement de mariage doit être proposée à toute personne qui passe d’une situation irrégulière à une situation de grâce.

Pour les divorcés remariés, c’est plus délicat. Le sacrement de mariage, le premier, le seul valide est encore vivant, il n’est pas mort. Les grâces de ce sacrement existent toujours. Comment les rendre efficaces pour accepter, de part et d’autre, entre l’époux blessé et lésé et l’époux unit «invalidement» à un autre conjoint, une vraie réconciliation dans le Christ, réconciliation toujours possible par un vrai pardon, par une nouvelle fidélité au jus corporis, du conjoint abandonné. Le jus corporis, c’est dans le droit romain, le ‘droit du corps’ que chaque conjoint a sur le corps de l’autre. Arriver à mettre cela en acte serait une vraie pastorale du mariage! On ne peut manquer de s’étonner que les Pères synodaux n’y aient pas songé.

Ils ont plutôt mis en avant la conscience intime pour justifier cette prise de distance de la loi morale objective, cela peut se comprendre aussi. La morale de l’Eglise n’était-elle pas trop sur «l’objectif» et pas assez sur le «subjectif» qui est tout de même le sanctuaire profond de la personne?

La conscience intime n’est jamais une prise de distance vis-à-vis de la loi morale objective. La conscience intime pose deux actes dit saint Thomas d’Aquin: elle juge ou elle reproche. Elle juge de la bonté morale d’un acte particulier, personnel et singulier… à la lumière de la loi morale qui est là pour l’éclairer. Et elle doit juger à partir du droit. Par exemple: j’ai froid, je suis sans abri, il y a en face de moi, une maison désaffectée. Est-ce que je commets un vol si je la squatte pour l’habiter le temps de me trouver un autre logement? Non, car le droit à l’usage des biens matériels dit l’Eglise est prioritaire sur le droit de propriété et tout propriétaire doit assistance à une personne en danger. Autre exemple: je suis seule, sans amour, je veux un père pour mes enfants, j’ai été abandonnée par mon premier mari? Est-ce que j’ai le droit de me remarier civilement et de vivre matrimonialement avec cet homme que j’aime? Si le Pasteur à qui la question est posée, répond, «oui, car vous n’êtes pas coupable dans l’échec de votre premier mariage» cela signifie que ce pasteur ne tient aucun compte de l’indissolubilité du mariage. Cette loi de l’indissolubilité n’aurait de force que dans une sorte d’idéal. Elle ne vaudrait que pour les «heureux», les «purs». Chaque personne qui aurait des difficultés avec la loi morale, aurait donc le droit de faire tomber la loi. Personne n’est obligé de faire ce qui est objectivement mal pour qu’il en ressorte un bien subjectif. Cela peut sembler très dur… mais le respect de la volonté de Dieu, de ses exigences amène à plus de bonheur que d’en construire un autre en édulcorant ses propres lois sous prétexte de miséricorde.

Mais l’Église n’a-t-elle pas à un vrai problème avec sa morale – suivie par très peu – ce synode lui offre la possibilité de changer cette culture morale familiale pour mieux s’adapter. N’est-il pas temps de le faire?

J’ai été amené un jour à conseiller une religieuse. Je lui demande ‘combien y avait-il d’enfants chez-vous’? Elle me répond avec un léger sourire pressentant le sursaut que me causerait sa réponse: ‘nous étions vingt-deux’! Devant ma surprise, elle me dit, ‘oui mon père qui était ministre avait trois femmes et nous, les enfants, nous savions très bien qui était notre mère. Notre père, lui, s’occupait de nous tous. Tous les matins, avant de partir au travail, il nous réunissait, nous faisait le catéchisme et après l’avoir embrassé nous partions chacun dans notre école ou à notre travail’. C’est un vrai modèle de famille patriarcale qui semblait fonctionner pas trop mal… Mais je n’ai jamais vu ce modèle en Occident. Ce que je vois de plus en plus, c’est un homme ou une femme qui me dit: ‘j’ai cinq ou même dix frères et sœurs, mais, si nous avons tous la même mère, nous n’avons pas tous le même père. Et l’homme avec qui vit ma mère aujourd’hui, n’est pas mon père…’ C’est une famille recomposée. Jamais je n’ai trouvé de bonheur sur le visage de celui ou de celle qui me parle de cette famille nouveau genre… Est-ce là la nouvelle culture familiale? J’ai rencontré une toute jeune fille qui disait à sa petite amie, ‘moi j’ai de la chance, à Noël, j’ai deux papas qui me donnent plein de cadeaux’. Cela a duré jusqu’au jour où, la petite amie, a invité la jeune fille, à un week-end dans sa famille, une famille où il n’y avait qu’un papa qui ne donnait pas souvent des cadeaux mais qui aimait sa femme et ses enfants. Et la jeune fille comblée de cadeaux est sortie songeuse de ce week-end. ‘Tu as bien de la chance, toi’, dit-elle à son amie!

Mais, je vous demande, quand donc la morale de l’Église a-t-elle été populaire? A quelle époque de l’histoire a-t-on été pleinement d’accord avec la morale de l’Église? L’Église est-elle faite pour aimer le monde, être du monde, penser comme le monde? Est-ce cela, sa mission? Quand on lit tout ce que l’on dit sur la nécessité, pour l’Église, de se mettre au diapason du monde, c’est-à-dire d’accepter l’avortement comme un fait normal, le divorce comme une mesure de stabilité de l’amour, l’homosexualité comme une autre façon d’avoir le plaisir sexuel, on se dit qu’il n’y a rien de nouveau sous le soleil. L’Église est là pour être la lumière des nations. Elle n’est pas là pour leur plaire!

Derrière les apparences du synode, ne se produit-il pas, en fait, une bataille d’écoles de théologies morales catholiques qui n’avaient jamais pu encore se confronter jusque-là à un tel nouveau?

Oui, je crois qu’il y a cela! Et j’ajoute que ce phénomène n’est pas nouveau. Dans ce synode, deux ou plusieurs théologies morales se sont affrontées, plusieurs écoles se sont disputées. Pour une bonne partie des experts, combien sont-ils? Le problème à résoudre n’est pas celui des divorcés remariés mais c’est celui de Veritatis Splendor l’encyclique de Jean-Paul II! C’est là où le bât blesse. Il y a diverses écoles: l’option fondamentale de Joseph Fuchs S. J., le proportionalisme de Peter Knauer, S.J. la systémie de Xavier Thévenot SDB et de Edgard Morin, l’école de Tubingen, l’école argentine de Lucio Gera, de Rafael Tello, de Juan Carlos Scannone,S.J. s’unissent pour faire disparaître Veritatis Splendor et sa théologie morale objective!

Une théologie où il est dit que «l’objet» moral est le point d’appui de la raison dans la recherche de la vérité morale. Or, on ne veut pas d’une théologie qui affirme l’existence d’une réalité morale malgré la fluctuation des circonstances. On veut bien de l’intention morale, on veut bien des circonstances qui en modèlent la pratique, mais on ne veut pas d’une application objective des principes de la loi morale, à la recherche honnête du bien. Cet affrontement des idées, ce combat des concepts est peut- être la cause d’une certaine confusion du langage qui risque, si on en croit les débats actuels, de diminuer la fécondité du synode. Peut-être a t-on le droit de penser à cette phrase de la Genèse «c’est là que Yahvé confondit le langage de tous» Gn 11,9. Une présence paradoxale de l’Esprit Saint!

En quoi ce synode serait un échec, en quoi peut-il être un succès?

Un synode n’est qu’une Assemblée partielle dans l’Église, il est là pour conseiller le Pape dans son rôle de Pasteur suprême et de gouvernement de toute l’Église. Le synode n’est pas un Concile, il n’engage pas l’autorité magistérielle infaillible de l’Église. Ni même l’autorité du Pape dans son magistère ordinaire. Tout dépend de ce que le Pape décide. Mais on attendait du Synode qu’il inaugure, pour toute l’Église, une véritable refonte de la Pastorale du Mariage et de la Famille. C’était peut-être un projet ambitieux. Peut-être faudra-t-il se contenter d’un début d’orientation. Nous sommes toujours pressés, et nous ne savons pas encore après plus de vingt siècles de Christianisme, laisser du temps à l’Esprit Saint.

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