Coptic Solidarity (Solidarité Copte) est une organisation dédiée à la promotion de l’égalité de la citoyenneté pour les chrétiens coptes d’Égypte et les minorités au Moyen-Orient. Elle est basée aux États-Unis (Virginia).

Le 23 janvier 2018, Coptic Solidarity a publié un document qui fut déposé auprès du Congés américain : « 44 Simple Questions to the Egyptian Authorities Regarding the Situation of the Copts », By Coptic Solidarity – Posted January 23, 2018.

Celui-ci a suscité une levée de boucliers de la part du Gouvernement égyptien et de l’Assemblée nationale (le parlement). Des personnalités coptes, religieuses et laïques, craignant des réactions d’hostilités et des représailles de la part des musulmans, ont cru bon de joindre leurs voix à celle des autorités.

L’objectif de ce document est de porter ces réalités à la connaissance de la France et autres pays francophones qui sont loin d’imaginer les humiliations, les discriminations, l’exclusion, la haine et la persécution insidieuse dont les Coptes sont l’objet depuis beaucoup trop longtemps, même en Égypte du président Abdel Fattah al-Sissi. Il s’agit d’alerter l’opinion sur « une autre » forme de persécution qui sévit également au Soudan et même pour les chrétiens d’Algérie, et par rapport à celles vécues par les Chrétiens d’Orient en Syrie, en Irak. 

Le drame des coptes d’Égypte s’inscrit dans le contexte, plus large, des persécutions subies par les minorités chrétiennes à travers le monde. Le manque d’information et l’indifférence contribuent à les perpétuer.

Cette situation dramatique n’est pas du tout médiatisée. Elle est comparable à une vraie guerre d’usure sournoise et silencieuse.

Voici la traduction française du document, publié en France au nom de l’AISCE (Association Internationale Solidarité Copte Europe), affiliée à Coptic Solidarity basée aux États-Unis.

44 questions à poser aux autorités égyptiennes pour apporter des solutions aux problèmes d’égalité citoyenne des Coptes en Égypte

Les questions soulevées par la discrimination et la persécution des Coptes en Égypte, ne peuvent pas être traitées tant que le problème lui-même n’est pas reconnu. Malheureusement, le seul problème qui préoccupe le gouvernement égyptien, les différentes institutions et le parlement, semble être ce qu’ils appellent « le ternissement de l’image de l’Égypte » par les militants des droits de l’Homme. Tant que le gouvernement égyptien ne mettra pas fin à sa stratégie actuelle de déni et de dissimulation, pour admettre les problèmes fondamentaux, aucun progrès ne sera possible. Au lieu de réagir, le gouvernement perd de l’énergie et des ressources, pour cacher et faire taire la voix de ceux qui osent parler et plaider pour l’égalité citoyenne des Coptes en Égypte.

Afin d’aider le parlement et les différentes institutions d’Égypte, et plus particulièrement le Président, censé être le garant ultime des droits de tous les citoyens, voici un ensemble de questions pour aider les autorités égyptiennes à trouver des réponses et des solutions.

1.      Quelles sont les statistiques officielles du recensement des Coptes ? Pourquoi le pourcentage des Coptes reste-t-il « secret » ?

2.      Quand on sait que l’administration de l’État Civil National conserve toutes les données des citoyens nés après 1900, dont la religion est une donnée absolument obligatoire, pourquoi le gouvernement continue-t-il à dire qu’ils ne connaissent pas le pourcentage des Coptes en Égypte ? Un simple questionnement de cette base de données ne peut-il pas rapidement révéler le pourcentage des Coptes ?

3.      En l’absence de toutes formes d’informations établies, on peut estimer que le pourcentage des Chrétiens s’élève à au moins 12%, pour une population comptant 95 millions d’habitants. L’État égyptien peut-il contester ce chiffre ?

4.      Durant les 5 dernières années, il y a eu plus de 500 agressions contre les Coptes. Combien ont été traduites en justice ? Et parmi celles-ci, combien de jugements ont été rendus ?

5.      Parmi les centaines de vols et d’agressions commises à l’encontre d’entreprises, de pharmacies et de bijouteries appartenant aux Coptes, combien ont été traduites en justice ?

6.      Pourquoi personne n’a été inculpé suite au scandale de l’agression commise sur Mme Souad Kamel, une femme copte de 70 ans, traînée toute nue dans les rues de son village ? En même temps, huit maisons appartenant à des Coptes de ce village ont été saccagées et brûlées. Malgré la présence de nombreux témoins et enregistrements vidéo, pourquoi les autorités locales et gouvernementales n’ont-elles pas été capables d’appliquer la loi et de rendre justice aux citoyens coptes ? 

7.      À chaque fois que des foules fanatisées agressent des Coptes sans aucune raison valable, et parfois même avec la complicité de la Sécurité Nationale, les autorités organisent des « réunions de conciliation » pour forcer les victimes à renoncer à leurs droits. Les victimes sont alors soumises aux décisions tyranniques de ces fanatiques soutenus par les autorités. Pourquoi les autorités organisent-elles de telles réunions, tout en sachant qu’elles sont contraires à la loi et à la justice ? Et pourquoi ces réunions sont-elles souvent suivies par des délocalisations forcées, imposées à des familles innocentes ?

8.      Est-ce qu’un jour les attaques contre les églises, comme celle des Deux Saints à Alexandrie, lors de la messe du nouvel an 2011, ou comme le massacre de Maspero le 10 octobre 2011, feront l’objet d’une enquêté objective et suivie d’un jugement impartial ?

9.      Parmi les 33 ministres nommés dans le gouvernement égyptien depuis septembre 2015, il n’existe qu’un seul ministre copte, sans portefeuille et sans travail réel. Est-ce dû à l’incompétence des Coptes ?

10.    Parmi les 27 gouverneurs nommés et les 4 gouverneurs adjoints, il n’y a aucun Copte. Pourquoi ?

11.    Parmi les 596 députés au parlement actuellement, il y a 39 Coptes dont 24 élus sur des listes électorales temporaires. Ce qui représente à peine 6%. Ce pourcentage est évidemment plus favorable que par le passé sous Moubarak, mais il est lié à des mesures temporaires qui prendront fin en 2020. Quelles dispositions constitutionnelles seront alors prises pour s’assurer d’une représentation juste pour les groupes minoritaires dans les prochains parlements ?

12.    Le parlement actuel comprend 24 commissions. Il n’y a pas un seul président copte et il y a seulement 3 vice-présidents coptes sur un total de 72 vice-présidents. Autre remarque : il n’existe aucun Copte dans la Commission de « Défense et Sécurité Nationale ». Comment expliquer ces faits, si ce n’est par l’exclusion délibérée et la négation des droits des Coptes ? 

13.    Dans les 18 universités d’état, il existe plus de 70 postes de hauts responsables : recteurs ou vice-recteurs. Parmi ces postes, combien sont occupés par des Coptes ? (Réponse suggérée : zéro)

14.    Les universités d’état en Égypte incluent plus de 280 facultés, avec plus de 960 postes d’encadrement : doyens et vice-doyens. Parmi ces postes, combien sont occupés par des Coptes ? (Réponse suggérée : 4)

15.    Pourquoi les étudiants coptes, qui obtiennent d’excellents résultats lors des examens anonymes en fin d’études secondaires, deviennent subitement « trop stupides » pour figurer parmi les meilleurs étudiants en fin de parcours universitaire ? Est-ce pour obtenir le résultat souhaité, à savoir moins de Coptes dans les postes universitaires ?

16.    Dans les universités publiques des gouvernorats de Minieh et Assiout, les étudiants coptes représentent environ 25% à 30% de l’ensemble des étudiants. Pourquoi le pourcentage de Coptes, parmi les professeurs de ces universités, est-il inférieur à 5% ? N’est-ce pas là une politique flagrante et préméditée de discrimination ?

17.    Pourquoi les étudiants coptes, diplômés en médecine, sont-ils interdits de se spécialiser en gynécologie ?

18.    Chaque année, combien de Coptes admis dans les différentes académies militaires et dans l’Académie de Police ? (Réponse suggérée : environ 1%)

19.    Quel est le pourcentage de Coptes travaillant dans les services de la Sécurité Nationale et des Renseignements Généraux ? (Réponse suggérée : zéro)

20.    Dans le Conseil National de la Défense qui supervise les Forces Armées, combien y a-t-il de Coptes ? (Réponse suggérée : zéro)

21.    Quel est le pourcentage de Coptes dans les différents corps judiciaires ? (Réponse suggérée : moins de 2%) 

22.    L’Égypte possède 167 missions diplomatiques dans le monde. Combien de Coptes parmi les responsables, ambassadeurs ou consuls généraux ? (Réponse suggérée : 3, mais aucun nommé dans une capitale de grande importance)

23.    Combien de Coptes dans les bureaux présidentiels ? Combien dans la Garde Républicaine ? (Réponse suggérée : zéro)

24.    Combien de Coptes ont accédé au poste de Directeur Général ou Sous-Secrétaire d’État dans l’Administration ? (Réponse suggérée : moins que 2%)

25.    Si les postes et les promotions dans la fonction publique, tous échelons confondus, sont basés sur la méritocratie et les qualifications, pourquoi ce processus n’est-il pas transparent pour assurer la sélection des meilleurs candidats, indépendamment de leur appartenance religieuse ? L’État se préoccupe-t-il de la discrimination insidieuse subie par les Coptes dans l’administration ?

26.    Parmi les 69 clubs de football comptant plus de 2000 joueurs inscrits en 1ère, 2ème et 3ème divisions, combien de joueurs coptes ? Quelles actions sont menées pour enquêter sur les nombreuses plaintes déposées par des athlètes coptes bannis des équipes sportives dans la plupart des clubs ?

27.    Pourquoi le gouvernement exige-t-il de connaître la religion ou l’absence de religion des citoyens ?

28.    Pourquoi l’appartenance religieuse doit-elle obligatoirement figurer sur les Cartes Nationales d’Identité ou dans d’autres documents : demande de candidature, y compris dans les sociétés privées, contrats commerciaux, actes de notariat, demandes d’adhésion à un club… ? 

29.    Si l’appartenance religieuse peut être immédiatement modifiée dans les documents officiels suite à une conversion « à » l’Islam, pourquoi n’est-il pas possible d’effectuer ce changement dans le cas d’une conversion « de » l’Islam à une autre religion ?

30.    Durant les quatre dernières années, une cinquantaine de personnes, en grande majorité coptes, ont été traduits devant les tribunaux, accusés d’avoir « tourné en dérision » la religion musulmane. Chaque jour, la religion chrétienne n’est-elle pas attaquée avec violence et mépris dans les mosquées et même sur les plateaux de télévision.

31.    Pourquoi des dizaines de Coptes, accusés de blasphèmes fabriqués de toutes pièces, se trouvent-ils toujours en prison ? Pourquoi les « semeurs de haine », comme le Cheikh Salem Abdel Galil, sont-ils libres de tout mouvement ?

32.    Parmi les dizaines d’Imams, qui incitent ouvertement à la haine et à la violence contre les Chrétiens, combien ont été traduits en justice ?

33.    Pourquoi les recommandations de la Commission « Oteify » (1972 !) chargée de mettre en application des actions qui pourraient réduire les conflits sectaires, y compris une loi unique pour mosquées et églises, n’ont jamais été mises en œuvre ?

34.    Malgré la nouvelle loi des églises, pourquoi plus de 250 églises sont toujours fermées par ordre de la Direction de la Sécurité Nationale ?

35.    Si la liberté religieuse existe en Égypte, comment se fait-il que prier dans sa propre maison, sans l’obtention d’un « permis », est considéré comme un crime ?

36.    Pourquoi le programme d’étude des écoles et des universités d’Al-Azhar, qui enseignent la haine et incitent à la violence contre les Chrétiens, n’a subi que quelques changements superficiels ? Dans ce contexte, est-il possible d’envisager que des étudiants, ayant subi une idéologie de haine, puissent vivre en harmonie avec des citoyens non-musulmans ? 

37.    Si les contribuables égyptiens sont traités d’une manière égale, comment se fait-il que les impôts payés par les Chrétiens financent Al-Azhar, dont le budget pour 2017 s’est élevé à 12,3 milliards de livres égyptiennes (alors que celui de l’Université du Caire était de 2,8 milliards) ? Pourquoi l’Université d’Al-Azhar offre-t-elle des bourses à des milliers d’étudiants étrangers pour suivre des études islamiques en Égypte, tandis qu’aucun financement publique n’est prévu pour les institutions d’études coptes en Égypte ?

38.    L’Université d’Al-Azhar, spécialisée au départ aux études islamiques, a élargi son rôle d’enseignement à celui d’un ensemble complet de facultés : médecine générale, médecine dentaire, ingénierie … Al-Azhar se situe aujourd’hui parmi les 10 plus grandes universités mondiales avec un demi-million d’étudiants répartis dans 87 facultés. Pourquoi les étudiants chrétiens sont-ils interdits d’étudier dans les facultés non-religieuses d’Al-Azhar ?

39.    Comment se fait-il qu’Al-Azhar a obtenu le droit de créer un système colossal d’éducation parallèle, de la maternelle au baccalauréat, financé par l’état ? Ce système, similaire aux Madrasas d’Afghanistan et du Pakistan, est présent partout en Égypte dans chaque commune. N’y a-t-il pas 2,1 millions d’élèves inscrits dans ces écoles ?

40.    Pourquoi les titulaires des diplômes secondaires d’Al-Azhar ont-ils le droit de s’inscrire dans les académies militaires et policières ? Les motivations de ces officiers ne sont-elles pas dues à des facteurs religieux plutôt que patriotiques ? N’est-ce pas la raison de leur haine pour les collègues et citoyens non-musulmans ?

41.    Pourquoi les programmes officiels d’études du Ministère de l’Éducation Nationale ignorent-ils sept siècles d’Histoire copte, tout en glorifiant des « héros » envahisseurs qui ont massacré des millions de Chrétiens en Égypte et en Afrique du Nord ?

42.    Comment se fait-il que les programmes officiels de la langue arabe incluent des sujets et des textes qui inspirent la haine des peuples ne partageant pas les mêmes croyances ? Ces textes n’incitent-ils pas à la violence, ne favorisent-ils pas un climat de suprématie islamique et ne forcent-ils pas les étudiants non-musulmans à se soumettre à une idéologie qui dénigre leur propre foi ? 

43.    Quand est-ce que « la question copte », traitée comme un simple « dossier » entre les mains de la Sécurité Nationale, deviendra-t-elle une cause citoyenne prioritaire pour le Président ?

44. L’article 53 de la Constitution égyptienne stipule que : « La discrimination et l’incitation à la haine sont punies par la loi. L’état est obligé de prendre les mesures nécessaires pour éliminer toute forme de discrimination. La loi régule l’établissement d’une commission indépendante pour cette raison ». Quand l’État prendra-t-il sérieusement en compte cette obligation constitutionnelle ? A quand une Commission indépendante pour combattre la discrimination religieuse ?

En France, l’Association Internationale Solidarité Copte Europe (AISCE) est affiliée à Coptic Solidarity aux États Unis. L’AISCE est une organisation qui vise à aider les minorités, et plus particulièrement les Coptes. Nous soutenons ceux qui œuvrent en Égypte pour la démocratie, la liberté et la protection des droits fondamentaux de tous les Égyptiens.

Pour plus d’informations, visitez notre site web : Coptic Solidarity – Advocacy for equality

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“Qu’Allah tue les chrétiens ! (Coran 9.30)”