(Liturgie de la Parole : Ac 5 12-16 ; Ps 117 ; Ap 1 9…19 ; Jn 20 19-31)

0412439752_nLe 30 avril 2000, Jean-Paul II canonisait Sœur Faustine Kowalska, et instituait, comme Jésus l’avait demandé par Sœur Faustine, le deuxième dimanche après Pâques : « Fête de la Miséricorde [1] ». C’est donc aujourd’hui dans l’Église entière la fête de la Miséricorde… en cette année de la Miséricorde !sainte-faustine-religieuse

Jésus dit à Sœur Faustine : « Je désire que la fête de la Miséricorde soit fêtée solennellement le premier dimanche après Pâques. En ce jour, les entrailles de Ma miséricorde sont grandes ouvertes et Je déverserai tout un océan de grâces sur les âmes qui s’approcheront de la source de la miséricorde. Toute âme qui se confessera et communiera recevra le pardon complet de ses fautes et la remise de leurs châtiments… »

Entendez-vous ? Jésus accorde aujourd’hui la même indulgence plénière que celle donnée le jour du baptême !

Lorsque Jésus ressuscité apparaît aux Apôtres dans le Cénacle verrouillé. Après avoir donné la paix, Il montre Ses mains et Son Cœur (Cf. Jn 20 26-27). De même, un soir de 1931, Jésus, vêtu d’une tunique blanche apparut à Sœur Faustine, une main levée pour bénir et l’autre posée sur Sa poitrine. De la tunique entrouverte sur le Cœur sortaient deux grands rayons de lumière, l’un rouge, l’autre pâle. Et Jésus lui dit :

« Peins un tableau selon l’image que tu vois, avec l’inscription : “Jésus, j’ai confiance en Toi”. Je désire que cette image soit exposée et honorée publiquement le premier dimanche après Pâques,56-122-thickbox d’abord dans votre chapelle, puis dans le monde entier. Je promets que l’âme qui honorera cette image ne sera pas perdue. Je lui promets aussi la victoire sur ses ennemis, dés ici-bas et spécialement à l’aube de la mort. Moi-même, Je la défendrai comme Ma propre gloire »

Ces deux rayons, l’un rouge et l’autre pâle, rappellent que sur le Calvaire le coup de lance fit jaillir du Cœur de Jésus du sang et de l’eau (Jn 19 34). Ce Sang de Jésus versé durant sa Passion,  nous le consommons lors de l’Eucharistie, et cette eau représente est celle qui lors de notre baptême nous a lavés de tous nos péchés, de même qu’elle figure le don du Saint-Esprit (Ez 36 25, 47 1-12, Mt 3 16 ; Jn 3 5, 4 14, 7 38, 1 Jn 5 6, Ap 22 1-2,17)… C’est comme si Jésus avait voulu Se servir de ce coup de lance pour nous dire que toute Sa vie n’avait pas suffi à nous dire Son amour fou pour nous... et que même mort, Il continuait à travers Son cœur transpercé à déverser sur nous Sa miséricorde et le don de Sa vie ! Comment ne pas voir dans ce Coeur ouvert et saignant encore l’annonce de la Résurrection ?! Comment ne pas voir dans ce double signe du Sang et de l’Eau, une épiphanie du Saint-Esprit, de l’Amour qui procède du Père et du Fils… manifestation de la Miséricorde, Charité infinie de Dieu ? De même que le Père nous a envoyé Son Fils, le Père (Jn 14 26) et le Fils (Jn 15 26) nous envoient leur Esprit, la Personne Amour qui unit le Père et le Fils, afin que nous vivions nous aussi de la vie de Dieu, qui est Amour. L’Eau et le Sang figurent ce double mouvement d’amour éternel du Père pour le Fils et du Fils pour le Père, images pour nous du Père qui donne et du fils qui pardonne. Au Calvaire a jailli la source de l’Amour ; du Cœur transpercé de Jésus s’échappent les eaux purificatrices et vivifiantes de la divine Miséricorde.

La miséricorde est l’amour le plus profond et le plus tendre, celui qui va jusqu’à se charger de la misère du prochain et à lui pardonner… Ainsi en est-il de l’Amour de Jésus qui pour nous est allé jusqu’à porter nos péchés, pour nous en décharger, à les souffrir, pour les expier, et à pardonner même le plus abominable d’entre eux : le déicide ! C’est parce que les Apôtres ont tous fait l’expérience de la Miséricorde et du Pardon de Jésus que nous les voyons, dans la première lecture (Ac 5 12-16), répandre à leur tour et à profusion la Miséricorde, prêchant le Salut et rendant la santé. Remplis de l’Esprit de Jésus qui guérit les blessures du cœur et abat les barrières qui nous séparent de Dieu et nous divisent, ils imitent le Christ penché sur toute misère humaine, matérielle et spirituelle. Aujourd’hui encore, c’est du message de la divine Miséricorde que nous devons nous inspirer pour résoudre la crise du sens et répondre aux défis de notre époque. Depuis que le Christ est mort pour chacun d’entre nous, chaque personne humaine a une réelle dignité… Le message de la divine Miséricorde est non seulement un message sur l’Amour fou de Dieu, mais aussi sur la valeur sacrée de tout homme. Qu’il est consolant pour celui qui, affligé par une dure épreuve, ou écrasé par le poids de ses péchés, de rencontrer le doux visage de Jésus, et de voir son chemin illuminé par les rayons jaillissant de Son Cœur ! « Ma fille, dis que Je suis l’Amour et la Miséricorde en personne », demanda Jésus à Sœur Faustine… « Toute âme qui croit et a confiance en Ma miséricorde, l’obtiendra ; qu’aucune âme n’ait donc peur de Moi, ses péchés seraient-ils comme l’écarlate. »

Par Sa messagère, Jésus nous invite à recevoir Sa miséricorde, c’est-à-dire à nous confesser et à communier. De même que sur l’image les deux rayons sont unis dans la Cœur de Jésus, de même sont indissociables pour le salut le fait de demander pardon et celui de s’unir au Christ au point de devenir Son corps et Son sang, vivre de Sa vie (Jn 15 5). Aussi bien est-ce un très grand malheur de l’Église de notre temps de voir tant de chrétiens communier indignement, recevoir le Corps du Christ et mépriser la pureté qu’Il nous a acquise au prix de Son Sang ! Saint Paul n’hésitait pas à écrire que celui qui communie indignement, c’est-à-dire sans mettre sa vie en conformité avec celle du Christ qu’il reçoit, “mange et boit sa propre condamnation“, et que c’était la raison pour laquelle plusieurs étaient malades et que d’autres avaient trouvé la mort (1 Co 11 29).

Notons bien enfin que si le pardon n’est pas une opération automatique :

« Recevez le Saint-Esprit. Tout homme à qui vous remettrez ses péchés, il lui seront remis ; tout homme à qui vous maintiendrez ses péchés, il lui seront maintenus (Jn 20 21-23). »

Le pardon des péchés suppose en effet certaines conditions : la contrition et la détestation de ses péchés, leur loyale et entière confession, leur possible réparation, le ferme propos de ne plus les recommencer, et la pénitence imposée.

De même que saint Jean, dans la deuxième lecture (Ap 1 17-18), tomba comme mort aux pieds de Jésus qui posa alors la main sur lui en disant : « Sois sans crainte. Je suis le Premier et le Dernier, Je suis le Vivant, et Je détiens les clés de la mort (Ap 17) », de même Jésus dit à Sœur Faustine :

« Il suffit de se jeter avec foi aux pieds de celui qui tient Ma place, de lui dire sa misère, et le miracle de la Divine Miséricorde se manifestera dans toute sa plénitude. Sache que c’est Moi-même qui t’attends dans le confessionnal. Je ne fais que Me cacher derrière le prêtre, mais c’est Moi qui agis dans l’âme qui a confiance en Mon amour infini, et il n’y a alors pas de bornes à Mes largesses. Même si une âme était comme un cadavre en décomposition et même si, humainement parlant, il n’y avait plus aucun espoir de retour à la vie, et que tout semblait perdu, le miracle de la Divine Miséricorde rendra la vie à cette âme. Oh ! Malheureux qui ne profitez pas de ce miracle de la Divine Miséricorde avant que vienne le Jour de la Justice ! »

Quelle grâce donc de pouvoir aujourd’hui nous laver dans le Sang de Jésus et retrouver l’innocence de notre baptême ! La plus grande peine de Jésus sur la Croix était bien de penser qu’Il versait Son Sang inutilement pour tant et tant d’âmes qui ne sauraient pas en profiter… Si nous aimons vraiment Jésus, ne laissons pas Son Sang versé inutilisé, mais servons-nous en pour nous garder toujours propres, beaux, saints, et immaculés, sous Son regard. Faisons-Lui porter les fruits de sainteté pour lesquels Il l’a versé ! Mais Jésus n’a que trop de raisons de Se plaindre :

« Je désire M’unir aux âmes humaines, Mon délice est de M’unir aux âmes. Lorsque Je viens dans un cœur humain par la sainte communion, J’ai les mains pleines de toutes sortes de grâces, et Je désire les donner aux âmes. Mais les âmes ne font même pas attention à Moi, elles Me laissent seul et s’occupent d’autre chose. Oh, comme cela M’attriste que les âmes ne comprennent pas Mon Amour ! »

Frères et sœurs, ces paroles nous rappellent l’importance de l’action de grâces après la communion. Sitôt la Messe finie, ne nous répandons pas en bavardages, mais sachons adorer Jésus en notre âme, et entretenir cet intime dialogue avec l’Amour en personne, contempler cette relation du Père et du Fils, cette vie intérieure et spirituelle, qui n’est autre que notre vie éternelle déjà commencée… Jésus disait encore à Sœur Faustine :

« Laisse-Moi te dire que la vie éternelle doit commencer ici sur la terre par la sainte communion. Chaque communion te rendra davantage capable de t’unir à Dieu pour toute l’éternité. »

Frères et sœurs, que venons-nous faire lorsque nous venons à la Messe ? Quelle faim avons-nous de Jésus ? Jésus Se plaint :

« Combien il M’est douloureux que les âmes s’unissent si peu à Moi dans la sainte communion ! J’attends les âmes mais elles sont indifférentes envers Moi. Je veux les combler de grâces et elles ne veulent pas les accepter. Elles Me traitent comme une chose morte alors que Mon cœur est rempli d’amour et de miséricorde »…

Aujourd’hui, Dieu patiente, Dieu nous supporte, Dieu fait miséricorde, Dieu attend notre conversion afin de nous soustraire aux rigueurs de Sa justice à laquelle il faudra « rendre jusqu’au dernier sou (Mt 26) »… C’est pourquoi la Mère de Dieu dit à Sœur Faustine :

« J’ai donné au monde le Sauveur, et toi tu dois parler au monde de Sa grande miséricorde et préparer le monde à la seconde venue de Celui qui viendra, non comme Sauveur miséricordieux, mais comme juste JugeOh ! Que ce jour est terrible ! Le jour de la justice a été décidé, le Jour de la Colère de Dieu… et les anges tremblent devant lui ! Parle aux âmes de cette grande miséricorde tant que c’est le temps de la pitié. » (PJ 634 ; Mars 1936), et Jésus : « Avant de Me montrer au Jugement dernier comme Juge équitable, J’ouvre d’abord toutes grandes les portes de Ma Miséricorde. Qui ne veut passer par les portes de Ma Miséricorde, doit passer par les portes de Ma justice. » (PJ 1145) ; « Les âmes périssent malgré Mon amère Passion. Je leur offre une dernière planche de salut : La fête de Ma miséricorde. Si elles n’adorent pas Ma miséricorde, elles périront pour l’éternité. […] Ce jour terrible, le jour de Ma justice, est proche. » (PJ 963-964) Que celui qui a des oreilles pour entendre, qu’il entende !

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1. Cf. Jean-Paul II, Homélie lors de la canonisation de sainte Maria Faustyna Kowalska, 30 avril 2000 (La Documentation catholique, n. 2226, 21 mai 2000, pp. 457-459).