La foi et la raison ne s’opposent pas, mais elles sont comme les deux ailes qui permettent à l’esprit humain de s’élever vers la contemplation de la vérité. La foi et la raison s’entraident mutuellement, ce qui faisait dire à saint Augustin : “Je crois pour comprendre et je comprend pour croire.” Essayons donc de comprendre comment il est possible d’affirmer en même temps l’unicité de la nature divine et la trinité des personnes divines.

Partons du point zéro pour que l’on ne puisse pas nous accuser de fausser notre raisonnement par des préjugés. Mettons-nous dans la peau d’un homme qui ne sait rien de Dieu, mais regarde le monde tel qu’il est. Il lui est facile de reconnaître que les êtres n’ont pas en eux-mêmes la source de leur existence, sans quoi ils ne pourraient pas ne pas exister, et existeraient toujours. Or, ce n’est pas le cas. En effet, aucun être n’a décidé d’exister. De cela il y a deux témoins : le phénomène du changement et celui de la multiplicité.

Le changement fait que un être qui existe aujourd’hui n’existait pas hier. Et que donc s’il existe aujourd’hui et non pas hier, c’est la preuve qu’il n’existe pas nécessairement., et si il n’existe pas nécessairement, c’est donc qu’il n’a pas en lui-même, la source de son existence, sans quoi il ne pourrait pas ne pas exister, et existerait toujours. Or, le phénomène du changement montre que ce n’est pas le cas.

La multiplicité vient de ce que chaque être a des limites qui sont différentes de celles des autres êtres. Parce qu’un être est limité, il ne peut pas avoir en lui-même la source de son existence, sans quoi cette existence serait sans limite.. elle serait donc parfaite, infinie … Or, tous les êtres sont imparfaits, finis.

Puisque nous n’avons pas la source de notre existence en nous-mêmes, que rien n’existe par soi-même, cela revient équivalemment à dire que tout existe par un autre, et que cet autre existe par Lui-même (sinon Il ferait Lui aussi partie de l’ensemble des êtres qui existent par un autre). Cet être qui existe par Lui-même et qui donne à tous d’être, on l’appelle “Dieu”.

Dieu est unique car ayant la source ou étant plutôt la source de Son existence, Il ne peut pas ne pas l’avoir, donc Il l’a pleinement, infiniment. Or, si il y avait deux Dieux, chacun devrait a voir quelque chose que l’autre n’aurait pas pour qu’on puisse les distinguer l’un de l’autre. Et donc aucun n’aurait tout. Donc aucun ne serait parfait. Donc aucun ne serait Dieu. Donc Dieu est nécessairement unique.

Dieu, cet Être qui existe par Lui-même, ne peut-on pas dire qu’Il est Son propre père ? En effet, si Dieu est cet être qui existe par Lui-même, alors Il s’engendre éternellement Lui-même, ne dépendant que de Lui pour exister. Dieu est donc son propre père, en un sens absolu, comme nous ne pouvons pas le comprendre, nous les hommes, pour qui être et être père ne sont pas synonymes : un homme peut être sans être père. Mais pour Dieu, être et être Père s’identifie.

C’est pourquoi Jésus dit dans l’Evangile : “N’appelez personne père sur la terre car vous n’avez qu’un Père qui est aux Cieux” pour bien nous faire comprendre la paternité en Dieu, paternité absolue, incomparable. Et donc, si Dieu est Père de Lui-même et en Lui-même, est-ce qu’il ne faut pas dire qu’Il est aussi Fils ? Car en effet, il n’y a pas de père sans fils.

Saint Paul affirme que les hommes sont inexcusables de ne pas reconnaître, à partir de la Création visible, l’existence de cet Être invisible qui est Dieu (Rm 1.19).

Or, dans le mouvement par lequel cet Être qui existe par Lui-même advient à Lui-même, par lequel Il s’engendre éternellement Lui-même, nous pouvons, en raison, en distinguer les termes du mouvement par lequel Il advient à Lui-même. Autrement dit, en Dieu, nous pouvons distinguer Celui qui veut être et Celui qui est voulu. C’est Le même ! Ou bien encore distinguer l’engendrant et l’engendré. C’est Le même ! Engendrant et Engendré, ou Père et Fils. Et entre l’Engendrant et l’Engendré, qui sont le seul et même Dieu, il n’y a pas rien, il y a l’engendrement par lequel le Père engendre le Fils et par lequel le Fils est engendré, l’Esprit d’Amour, par lequel le Père donne la vie au Fils et par lequel le Fils en retour donne Sa vie au Père, réfléchit le Père. Et c’est ainsi que nous pouvons voir comment la raison peut accepter que dans cet être qui S’engendre éternellement Lui-même, il y a effectivement la place pour les termes du mouvement par lequel Il advient éternellement à Lui-même …

Dieu est l’être qui S’engendre éternellement Lui-même. Dans l’unité du mouvement par lequel Il advient à Lui-même, il est possible de distinguer l’Engendrant et l’Engendré … et l’Engendrement qui les réunit.

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